Les héros de la guerre de Troie comme exempla ? Réflexions autour d’une édition de 1573

DOI : 10.56078/atlantide.352

Riassunti

L’article se propose d’explorer la réception et la diffusion des récits troyens à la Renaissance, à travers l’étude d’un volume publié à Bâle en 1573 par P. Perna (Belli Troiani scriptores praecipui), ouvrage volumineux qui, outre l’intégralité de l’épopée homérique en traduction, compte plusieurs œuvres. On peut ainsi découvrir les textes de Dictys et de Darès, mais également deux déclamations « troyennes » de Libanios ainsi qu’une déclamation d’Aelius Aristide. Toutes ces œuvres sont traduites en latin. Sont en particulier reprises les traductions de deux déclamations (une de Libanios, décl. 5, et une d’Aelius Aristide, Or. 16 K) originales de l’humaniste J. Camerarius, publiées pour la première fois en 1535 à Haguenau. L’enquête autour de l’ouvrage de Perna a pour but de mettre en lumière la chaîne des publications contenant ces récits troyens, mais cherche également, de façon plus spécifique, à travers la lecture des épîtres préliminaires, à mettre en évidence le rôle de ces récits dans le contexte de l’époque.

The paper explores the reception and dissemination of Trojans tales in the Renaissance, through the study of a volume published in Basel in 1573 by P. Perna (Belli Troiani scriptores praecipui): this is a voluminous book containing several works, together with the Homeric epics in translation. There are indeed the texts of Dictys and Dares, but also two “Trojan” declamations by Libanius and a declamation by Aelius Aristides. All these works were translated in Latin: two declamations (Libanius, decl. 5, and Aelius Aristides, Or. 16 K) have been translated by the humanist J. Camerarius and published for the first time in 1535 in Haguenau. The investigation on Perna’s work aims to highlight the purpose of publications concerning the Trojan legend, as well as the role of these stories in the cultural context of the time.

Testo completo

Si Homère, à partir de l’editio princeps de 1488 des épopées, fait partie des auteurs volontiers publiés à la Renaissance, l’Iliade assez rapidement sera accompagnée d’autres récits relatifs à cet événement. Cet article se propose de porter une réflexion sur la réception humaniste des récits troyens, réflexion centrée sur une édition bâloise datée de 1573. C’est à cette date en effet que Petrus Perna (1522-1582) publie un ouvrage intitulé Belli troiani scriptores praecipui1, comprenant non seulement une traduction latine de l’Iliade, mais également, comme le titre le laisse entendre, d’autres écrits liés à la guerre de Troie. On trouve ainsi, dans l’ordre suivant, l’Éphéméride de Dictys le Crétois, le récit de L’histoire de la destruction de Troie dû à Darès le Phrygien, deux déclamations dont l’une de Libanios2, une sorte de paraphrase versifiée du récit de Darès en six livres, l’Iliade3, une déclamation d’Aelius Aristide4 ayant pour sujet l’Ambassade auprès d’Achille, puis la déclamation de Libanios qui en constitue l’antilogie5. A l’époque de cette publication, les récits attribués respectivement à Dictys et à Darès, sont déjà, comme nous le verrons, largement diffusés. De même, deux parmi les plus importantes déclamations « troyennes » de Libanios6 circulent à cette date, au moins dans le milieu des érudits, puisqu’Érasme les fait paraître en 1519 à Louvain dans le texte grec et avec une traduction. Quant à la déclamation 5 du sophiste d’Antioche elle est traduite en 1535 par les soins de l’humaniste J. Camerarius qui la publie à Haguenau conjointement avec la déclamation d’Aelius Aristide, en compagnie de l’Iliade et d’une paraphrase en grec de l’épisode de l’Ambassade auprès d’Achille. Et l’Iliade, à cette date, est diffusée, aussi bien dans les traductions latines que propose l’imprimeur bâlois, qu’en grec, depuis la magistrale édition de Henri Estienne en 1566. Autrement dit, l’ouvrage de Perna en 1573, se situe à la confluence de plusieurs traditions éditoriales, et en représente en quelque sorte un terme, dans une originalité éditoriale qui n’est pas due à la reprise de traductions connues depuis un certain temps, mais plutôt par l’association de l’ensemble de ces textes. Aussi, a-t-il semblé intéressant de se pencher tout particulièrement sur ces différents héritages, afin de tenter de percevoir une éventuelle évolution dans la connaissance de ces textes anciens, ou dans leur appréciation, puis de tenter de percer les raisons qui ont pu pousser un imprimeur au faîte de sa notoriété de reprendre à son compte un tel ouvrage. Les préfaces, comme souvent dans les éditions de la Renaissance, prennent toute leur importance pour comprendre les projets éditoriaux, mais il convient aussi de s’attarder sur les contextes historiques qui entourent les ouvrages. L’enquête qui suit, se déroulera par conséquent en plusieurs étapes propres à éclairer ces points : un état de la question sur les éditions dont Perna a pu s’inspirer, puis une contextualisation historique et éditoriale de la décennie 1570-1580, qui ouvrira sur une tentative d’éclaircissement de l’importance de ces récits troyens, et tout spécialement Homère, pour Perna à Bâle en cette année 1573, et sur l’originalité de cette publication.

Les récits troyens sont nombreux à connaître un succès durant tout le Moyen Âge, que ce soit l’Énéide, l’Iliade latine7, l’Achilléide de Stace, etc. Parmi ces innombrables textes, l’Excidium Troiae attribué à Darès et, dans une moindre mesure, l’Ephemeris de Dictys le Crétois, connurent une faveur exceptionnelle8. A partir de l’invention de l’imprimerie, ces deux œuvres continueront à être tout particulièrement appréciées, comme en témoignent le nombre relativement élevé d’incunables qui leur sont dédiés9. Une des premières impressions voit le jour, sans doute en 1472, à Cologne, dans l’atelier de Johann Schilling (dit Solidi), d’après les conjectures modernes. Ce dernier fit des études à Bâle au début des années 1460, puis s’installa vraisemblablement comme imprimeur dans cette cité qui verra, presque un siècle plus tard, Petrus Perna s’y établir à son tour. L’ouvrage de Schilling comporte déjà les deux textes, ceux de Darès et de Dictys, dans une association que l’on observera inchangée tout au long du XVIe. L’atelier de Nicolas Philippi (dit Pistoris) et Marc Reinhard à Lyon reprendra à son compte cette édition en 1478.

A la suite des nombreux incunables proposant les textes de Dictys et Darès, une édition du début du XVIe doit retenir notre attention. En 1529, à nouveau à Bâle, Andreas Cratander10 publie en effet un ouvrage incluant ces mêmes récits, suivis de trois déclamations traduites en latin par Erasme. Parmi celles-ci on trouve la déclamation numérotée 3 de Libanios (Discours d’ambassade de Ménélas aux Troyens), imprimée par P. Perna en 1573. Cette édition de 1529 offre une épître dédicatoire de Franciscus Faragonius à Bernardus Rictius, qui n’est autre que celle qui figurait déjà en 1498 dans l’ouvrage publié à Messine par Guilelmus Schonberger11, qui correspond vraisemblablement à sa date de rédaction, épître qui sera à nouveau reproduite dans un petit in quarto publié à Lyon par Gryphius en 1569 et contenant des récits troyens.

Ces ouvrages forment une chaîne à laquelle l’édition bâloise de Perna est directement rattachée. Faragonius, dans son épître de 1498, évoque uniquement l’ouvrage de Dictys12, le présentant comme un témoin oculaire des événements qu’il raconte13. A la Renaissance, aussi bien l’œuvre de Dictys que celle de Darès continuent à être perçues comme authentiques et la remarque de Faragonius à son ami Rictius, en parlant de Dictys, compagnon d’Idoménée qui, scripsit enim quae vidit, quibus interfuit, quae gessit, résonne comme une évidence que nul ne met en doute14. Ces lectures, dit-il, sont aussi des moments de récréations aux échos multiples, pouvant répondre à toutes les attentes d’un homme instruit comme le dédicataire (oblectare te poterit), puisqu’elles peuvent aussi bien être perçues comme une sorte de manuel de science militaire (rei militaris disciplina), qu’être utiles pour toutes autres choses (aliarumque rerum multiplici varietate) : « en effet, si c’est la ruse dans la guerre que tu recherches, tu as Ulysse ; si tu désires la supériorité et le courage, regarde vers Achille ; si tu choisis le sérieux de la parole publique, porte ton regard sur Nestor » (Nam si astutiam in bello quaeris, habes Ulyssem. Si praestantiam fortitudinemque desideras, intuere Achillem. Si concionandi gravitatem peroptas, Nestorem prae oculis pone). Cette remarque s’inscrit dans un fond de topoi liés à la guerre de Troie, et propres à être intégrés dans les épîtres dédicatoires. C’est ainsi que dans les dernières lignes de l’épître qui ouvre le volume de Petrus Perna en 1573 et qui est adressée au célèbre Lazare de Schwendi, baron de Hohenlandsberg15, ce dernier est apostrophé de la manière suivante : « Toi tu imites par tes actes illustres le courage d’Achille, la prudence d’Ulysse, la sagesse de Nestor » (Tu Achillis fortitudinem, tu Ulyssis prudentiam, tu Nestoris sapientiam praeclaris tuis factis imitaris). Le triptyque traditionnel des héros homériques présentés comme exempla par Faragonius en 1498, deviendra un peu moins de 80 ans plus tard matière à éloge, tout à fait adapté au personnage de Lazare de Schwendi, qui servit deux empereurs, Charles Quint et Maximilien II, et qui fut en correspondance régulière avec de nombreux Humanistes16. Il se distingua particulièrement dans le domaine militaire, sur les champs de bataille, mais également comme théoricien de la guerre17. Mais, essentiellement, il prit part de façon active aux débats et réflexions liés aux conflits religieux. Influencé par les penseurs et théoriciens français, comme Michel de l’Hôpital, il préconise la tolérance dans l’empire germanique, seul moyen d’assurer la paix selon lui. Et dès le 5 décembre 1569, dans une lettre adressée à Maximilien II, il prend l’exemple de la France pour expliquer qu’il est inutile de tenter de briser l’élan du protestantisme en Allemagne par la force : seules des mesures de tolérance permettront d’assurer la paix18. C’est donc aussi à un humaniste auquel s’adresse cette épître19.

C’est bien ce dont témoigne l’adresse à Lazare de Schwendi par Georg Henisch, humaniste et médecin allemand (1549-1618). Dans les premières pages, il convoque une sorte d’allégorie des trois âges de l’humanité, à l’instar, dit-il, de la division de l’âme en trois parties. La première période, qu’il qualifie du terme grec de ηγεμονικόν, – « la partie directrice de l’âme » –, représente une sorte d’âge d’or, d’où étaient exclus l’ambition et l’avarice, la mollesse et la luxure avec leur suite logique, les maladies, et qui fut une période de découverte de tous les arts, l’astronomie en premier. « Ce n’est donc pas sans raison que cet âge fut appelé ηγεμονικόν ou sapiens », non igitur immerito ηγεμονικόν seu sapiens seculum appellatur, conclut le rédacteur de l’épître. La période suivante fut la bien nommée θυμικόν,puisqu’elle fut le théâtre de ces expéditions chantées par les poètes, la navigation vers Cholchis, la guerre thébaine et la guerre de Troie. Ces épisodes glorieux virent s’affronter tous les héros bien connus, qui, à l’instar du plus célèbre d’entre eux, Achille, cultivaient une vigueur tout à la fois physique et morale. La tempérance, exempte de toute volupté est l’image que l’on garde d’eux. Le troisième âge qualifié de έπιθυμικόν, un quasi néologisme20, représente la partie la plus basse de l’âme, celle des désirs et des passions21, et le degré suprême de dégénérescence (indicium summae degerationis). Georg Henisch insiste sur son époque, marquée au plus haut point par l’intempérance et la cupidité, source de tous les maux22. A la suite de cet état de l’humanité de son temps, il en vient à poser la question du lien qu’il convient de faire entre ce long préambule sur les trois âges et l’ouvrage qu’il présente (Sed quorsum haec tam multa ?). Or, il explique que les histoires de la guerre de Troie représentent un témoignage de poids de la vertu sage et pure des anciens âges (belli Troiani historiae […] luculentum testimonium habeant sapientiae et sincerae virtutis veterum seculorum). Les écrivains de la plus haute Antiquité (antiquissimi) en sont les hérauts (praecones) et les interprètes (interpretes) et il n’en existe pas de plus anciens que ceux qui figurent dans l’ouvrage, puisque, en-dehors de l’expédition des Argonautes et de la guerre de Thèbes, toutes les époques antérieures à la guerre de Troie ne méritent que le nom de fables (fabulae dici merentur). Ces considérations l’amènent à distinguer entre deux genres (genera) d’auteurs présents dans l’ouvrage : Dictys et Darès qui sont des témoins directs, puisqu’ils participèrent eux-mêmes à la guerre, et Homère qui vécut bien après la guerre, chez lequel il ne convient pas de chercher une vérité historique23. Suit un éloge, assez convenu, du style d’Homère qui a, avec justesse, dit-il, été qualifié de divin par Démocrite. Les deux dernières pages de l’épître sont consacrées – partie attendue – à l’éloge du dédicataire, dans lequel se situe la comparaison de Lazare de Schwendi avec Achille, Ulysse et Nestor, trois représentants de cette époque qui vit la tempérance régner. Une absence notable, cependant, est à remarquer dans cette épître : si G. Henisch parle amplement des récits de la guerre de Troie, Dictys, Darès, Homère, il ne consacre pas une seule ligne aux déclamations, les mélétai, qui accompagnent ces textes.

Pourtant dans cette partie de l’ouvrage, comme dans le cas des récits de Dictys et de Darès, l’édition de P. Perna de 1473 s’inscrit également dans une tradition éditoriale bien attestée. Il faut, cependant, dissocier les déclamations 16 d’Aelius Aristide et 5 de Libanios des deux autres qui sont, d’une part la mélétê actuellement connue comme le n° 3 dans le corpus du sophiste d’Antioche (Discours d’ambassade de Ménélas aux Troyens), d’autre part une déclamation intitulée Quae dixerit Andromache interfecto Hectore, qui n’appartient pas au corpus de Libanios. La première apparaît à la p. 201 sous le titre suivant : Libanii Sophistae declamatio sub persona Menelai, pro concione Troianorum, Helenam & res repetentis, ni reddant, armis iniuriam ulturum se de nunciantis, latina facta. Desid. Eras. Rot. Interprete, la seconde suit immédiatement, à partir de la p. 213, sans aucune mention du nom de Libanios. Il y eut, au sujet de cette déclamation, un certain flottement quant à l’attribution, en dépit des précisions sans appel d’Érasme lui-même. Il convient, par conséquent, de retracer, succinctement, le parcours éditorial de ces mélétai.

Il est à noter tout d’abord qu’aucune déclamation ne figure dans l’ouvrage daté de 1498, qui comprend les textes de Dictys et Darès, et dans lequel on trouve la préface de Faragonius évoquée plus haut. Mais on en trouve dans l’ouvrage publié à Bâle en 1529 par Andreas Cratander. Comme sa page de titre24 l’annonce, ce livre contient les textes de Dictys, Darès et trois déclamations, dont une seule, avec raison, est attribuée de façon assurée à Libanios25. Toutes trois sont traduites par Érasme, traductions reprises dans l’édition de Perna pour les deux qui sont concernées. Et l’humaniste de Rotterdam, dans une adresse à Nicolas Ruterius, archevêque d’Arras, datée de 1503, – et reprise dans de nombreuses éditions, dont celle de Cratander de 1529 – fait l’éloge de la mélétê de Libanios, mais précise sans ambiguïté que les deux autres ne peuvent pas être attribuées au sophiste d’Antioche, en soulignant de surcroît leur qualité littéraire moindre26. En dépit de ses affirmations, un certain flottement continue à prévaloir sur l’attribution de ces déclamations, puisque la page de titre d’un petit in quarto publié à Lyon en 1569 par Gryphius reste suffisamment vague : Dictys Cretensis et Daretis Phrygii, De bello troiano historia. Declamationes tres Libanii Sophistae eiusdem fere argumenti, à l’instar de la page de titre de l’édition bâloise de 1573. Plus étonnant encore, la mention qui clôt les trois déclamations dans l’édition de Cratander de 1529 : Libanii sophistae declamationum Erasmo Roterod. Interprete, finis, alors même que la page de titre laisse clairement entendre que deux de ces discours ne peuvent être attribués au sophiste d’Antioche. L’inverse de ce que nous trouvons dans l’édition de P. Perna, dont la page de titre est, à ce sujet, imprécise, mais qui est dénuée de toute ambiguïté dans le corps de l’ouvrage.

Cet aspect souligne que l’imprimeur bâlois ne s’est pas contenté de reprendre sans examen les éditions antérieures, ce que confirme la déclaration contenue dans le titre même au sujet des textes de Dictys, Darès et de l’Iliade, dont on annonce au lecteur qu’ils ont été corrigés (a mendis expurgati). Mais ce que souligne également le titre c’est la volonté d’une unité thématique, la guerre de Troie, dont font partie intégrante les déclamations qui figurent dans l’ouvrage. Participent de cette volonté l’inclusion des deux déclamations liées à l’Ambassade auprès d’Achille, qui connurent un destin éditorial particulier, auquel P. Perna, prit part dans une certaine mesure. C’est à Haguenau, en 1535 que sort un ouvrage des presses de P. Bruebach, aux bons soins de l’humaniste Joachim Camerarius27, par ailleurs très grand connaisseur d’Homère28. Il réunit les deux mélétai, un discours d’Ulysse pour convaincre Achille de reprendre le combat auquel son auteur, Aelius Aristide, donne le titre Πρεσβευτικός προς Άχιλλέα (Or. 16), et la réponse d’Achille, imaginée deux siècles plus tard par Libanios, Γάντιλογία παρ Άχιλλέως προς Όδυσσέα (DécL 5). Les textes sont donnés en grec, puis dans une traduction latine due à Camerarius, qui ajoute, à la fin de l’ouvrage, ce qu’il appelle une paraphrase, réécriture en prose et en langue grecque, des deux passages de l’Iliade (Il. 225-306 et 307-429). Or, ce faisant, il donne en réalité l’edito princeps des deux discours, « oubliés » pour des raisons diverses dans les premières impressions des œuvres des deux sophistes29. Or, c’est P. Perna qui, le premier, permettra à la déclamation aristidienne de trouver sa place dans le corpus intégral de l’œuvre du sophiste, dans un ouvrage publié à Bâle en 1566, en quatre volumes, avec les traductions latines des discours par le célèbre érudit Guillaume Canter, dont le travail scientifique, – en particulier ses conjectures –, sera unanimement loué à toutes les époques. En tête du discours 16, le Πρεσβευτικός προς Άχιλλέα, il précise qu’il a trouvé la déclamation dans l’édition de J. Camerarius, et qu’il l’a authentifiée comme appartenant effectivement au corpus aristidien, avant de la traduire à son tour30.

L’édition de P. Perna, en 1573, apparaît donc comme le réceptacle de nombreuses traditions éditoriales et de plusieurs travaux scientifiques. En effet, son livre offre, outre les traductions attribuées traditionnellement aux textes de Dictys et Darès31, des traductions d’Érasme pour deux déclamations, celles de plusieurs humanistes pour l’Iliade (les chants I, II et IX traduits par Vincent Obsopoeus (Heidecker)32 ; les chants III-V traduits pas Nicolaus Valla (Nicolaus De Valle)33 ; les autres traductions sont celles de Eobanus Hessus, connu pour ses talents de poète au XVIe s.34, puis celles de J. Camerarius pour les déclamations d’Aristide et de Libanios. La reprise d’éditions antérieures n’a rien d’étonnant, et reste chose courante tout au long du XVIe s., mais Perna a puisé dans différents fonds pour constituer un ouvrage original dans sa composition si ce n’est dans les textes proposés, avec un nouveau projet.

Or, cet imprimeur qui occupa une place centrale à Bâle durant plus de vingt ans, n’était peut-être pas celui dont on attendait un ouvrage centré sur la guerre de Troie. En effet, si l’on regarde l’ensemble de sa production, telle que L. Perini35 la présente, on constate que, du début de son activité (1549) à la fin (1582), peu d’auteurs de l’Antiquité gréco-latine sont représentés. Sur un total de 430 publications recensées on en dénombre une petite dizaine parmi lesquelles deux éditions de Plotin (n° 32 et 355)36, le corpus aristidien évoqué plus haut dû à Canter (n° 100), de la même année 1566 un Lycophron (n° 105), notre édition des récits de la guerre de Troie (n° 203), en 1578 un autre volume consacré à la guerre de Troie (n° 312)37, des traités d’Hermogène et d’Aphthonios, ouvrage non daté (n° 378) ; dans la catégorie Edizioni non identificate L. Perini ajoute un Élien non daté (n° 384), La poétique d’Aristote (n° 389)38, Syrianus (n° 420). La moisson est maigre, encore davantage si l’on se réfère aux ouvrages réellement connus. Intéressons-nous, pour notre propos, aux deux éditions de Plotin, aux deux publications sur les récits de la guerre de Troie, et au volume en latin du corpus aristidien. Des liens peuvent déjà être conjecturés entre ce dernier ouvrage et les récits troyens de 1573 : il est à peu près assuré que P. Perna avait les volumes édités par Canter en tête, lorsqu’il prévoit le Belli troiani scriptores praecipui. Sa connaissance, rare à cette époque, de l’existence des deux déclamations, celle d’Aristide et celle de Libanios, sur l’ambassade auprès d’Achille, lui venait soit de Canter qui publia les traductions aristidiennes chez lui en 1566, soit directement de J. Camerarius à qui l’on doit la découverte de ces deux discours dans son édition de 1535. On sait, en effet, que l’humaniste et Perna étaient en correspondance étroite ainsi qu’en témoignent les nombreux échanges épistolaires entre les deux hommes39. Cela permet à Perna de publier un livre unique dans le choix des textes proposés, car ni avant, ni après, à notre connaissance, nous ne trouverons plus associés l’ensemble de ces œuvres ; si joindre Dictys, Darès, Homère, et la déclamation de Libanios n° 3 sur Ménélas n’avait, on l’a vu, rien d’exceptionnel, l’ajout des deux mélétai sur l’ambassade auprès d’Achille, procure à ce travail un atout indéniable et une originalité certaine. La question que l’on peut se poser, mais pour laquelle on n’a pas de réponse, c’est le choix qui a été fait de privilégier la traduction de J. Camerarius de 1535 et non pas celle de G. Canter de 1566. Etait-ce un choix scientifique ou une préférence liée à sa proximité avec Camerarius ? Si ce point ne peut être éclairci, il est évident que l’éditeur bâlois avait perçu l’importance de ces deux textes, egregium exemplum scholasticum, « exemple remarquable de déclamations », comme le proclame fièrement la page de titre de l’édition de Camerarius en 1535.

Cependant, pour revenir aux publications de l’imprimeur bâlois, il n’y a rien d’étonnant à trouver si peu d’ouvrages en lien avec l’Antiquité. On sait, en effet, qu’il quitta sa cité natale de Lucques et l’Italie en raison de ses sympathies pour le protestantisme et on le retrouve dès 1543 à Bâle au service de Jean Oporin40 chez qui il apprend le métier d’imprimeur, ainsi que chez Michael Isingrin par la suite. Pendant une douzaine d’années (1543-1555) il établit à travers l’Europe divers contacts, en particulier dans les milieux favorables au protestantisme41 sans être établi à Bâle42. Le 9 juin 1557 il devient officiellement citoyen de la ville de Bâle ; et, à l’automne, il semble définitivement installé dans des locaux destinés à l’impression43. Il arrive dans un espace déjà occupé par sept ou huit imprimeurs dont chacun avait une ligne éditoriale bien marquée. Une majorité d’ouvrages sortant des presses bâloises est marquée par la culture grecque44, avec entre autres Jean Oporin dans le domaine littéraire grec (dramaturgie, poésie et rhétorique) ou Froben pour Homère et les traités de médecine grecque. Perna va très rapidement se démarquer de cet environnement puisque, dès l’année 1558, il imprime sous son nom treize ouvrages marqués essentiellement par la culture italienne, parmi lesquels quatre livres de Jacobus Acontius45, Italien qui prônait la tolérance et la liberté religieuses, mais aussi un traité de Pierre Martyr Vermigli, théologien italien engagé aux côtés du protestantisme46, ou des œuvres de médecine ou d’alchimie avec les noms de Jean-Baptiste Montano47 ou Guillaume Gratarolo par exemple48. Une ligne éditoriale se dégage donc très rapidement, ouvrages scientifiques, plus particulièrement la médecine et l’alchimie, et des ouvrages impliqués dans les grands débats théologiques du temps49. Il faut ajouter à ces deux grands domaines l’histoire qui sera omniprésente dans les publications de Perna, et tout particulièrement dans la décennie qui nous intéresse, les années 1570-1580.

Que penser, alors, de ce petit nombre d’ouvrages consacrés à l’Antiquité gréco-latine dans un ensemble qui tourne ostensiblement son regard dans d’autres directions. Avant de revenir à notre édition des récits troyens il convient de s’attarder un instant sur les deux éditions de Plotin. Quelle que soit la manière dont P. Perna a découvert le philosophe néoplatonicien50, ces deux éditions sont d’une grande importance. Le volume qui paraît en 1559, contient une épître dédicatoire de Perna au duc Cosme de Médicis (1519-1574), homme de culture, dans l’espoir d’obtenir une aide financière51. En 1580, lors de la parution du second volume consacré à Plotin, la situation est toute différente dans la capitale toscane, puisque le fils de Cosme, Francesco a pris la succession et que la cité s’est considérablement appauvrie. Perna, pour une raison qui n’est pas clairement établie, dédie ce nouvel ouvrage aux autorités de Nuremberg52. Cette préface a été perçue comme une sorte de testament de l’imprimeur bâlois53. Il s’agit d’un texte fortement polémique, dans lequel il revendique la proximité de la philosophie platonicienne avec le christianisme (ut philosophiae Platonicae, h. e. quae Christianae religionis maxime affinis est) et s’en prend aux théologiens de son temps, marqués par l’intolérance et les croyances superstitieuses. On ne peut comprendre cette préface qu’en vertu de la situation politique de l’époque et de la position de Perna lui-même face aux autorités. En effet, ses éditions successives vont petit à petit le rendre suspect auprès des autorités de la ville qui dans la décennie 1570-1580 exercent une surveillance accrue sur l’activité éditoriale54. Le climat religieux a changé, les positions se sont radicalisées et les discours sur la tolérance n’ont plus guère d’audience. Ainsi, en 1578, il sera en butte à des accusations et à un procès lors de la parution des Dialogi IIII, œuvre posthume de Sébastien Castellion (Châteillon). Cet humaniste protestant fut un temps disciple de Calvin, mais s’opposera à lui pour prôner la tolérance après la condamnation de Michel Servet à Genève (1553) et se réfugiera à Bâle où il connut une grande proximité avec Perna55. Pour répondre à ses accusateurs, l’imprimeur bâlois rédige une lettre adressée au Grand Électeur de Saxe, en guise de préface des œuvres de Giovio (1578). Il s’agit d’un véritable hymne à l’universalité des hommes qui naissant pareillement (Nascimur enim ex semine et sanguine omnes), ont droit au même respect. Il rappelle les deux liens essentiels, jusque là, de son programme éditorial, les écrits théologiques et l’histoire (Les Historiae de Giovio) et se plaint des obstacles nombreux aux entreprises éditoriales à son époque. La situation a bien changé, rappelle-t-il, l’intolérance a gagné et la conclusion s’impose : il doit reculer face à la nécessité du temps et interrompre la publication d’ouvrages à tonalité théologique pour ne garder que l’Histoire (itaque cedendum tempori existimavi, ita quidem ut, intermissis ex parte aliquandiu theologicis libris, me interim totum pene historiae traderem).

Pourtant, l’année 1573 qui nous intéresse, fut l’objet d’une intense activité dans l’atelier de l’imprimeur bâlois, puisque 24 ouvrages, loin d’être uniquement à tonalité historique, sortent de ses presses56. On peut dire que l’ensemble de la production de cette année est en total accord avec ce que nous avons pu percevoir de la ligne éditoriale de Perna, des ouvrages de théologie, de médecine et d’histoire pour la très grande majorité. Parmi eux quatre traductions de Paracelse qui s’inscrivent dans un projet qui semble tenir à cœur à l’imprimeur57. Dans une dédicace adressée à Pierre de Gantrye58 ouvrant le volume de la Chirurgia magna du médecin suisse, Perna se plaint d’avoir attendu en vain une traduction de Gérard Dorn, qui assurait ce travail pour lui jusqu’à cette date et il l’accuse en quelque sorte d’avoir tout fait pour rendre l’ouvrage suspect aux médecins de la cité, au point d’en arriver à l’interdiction, aussi bien de la traduction que de la publication, par les censeurs59. Même si la flatterie qui émane de cette épître, destinée à courtiser un mécène, a pu faire douter de la sincérité de Perna, l’ensemble de son œuvre éditoriale doit peser en faveur « de convictions d’ordre philosophiques et politiques. En effet, avec des auteurs comme Paracelse, Castellion ou Machiavel, Perna avait élaboré un programme assez provocant pour mobiliser contre lui l’orthodoxie universitaire »60. Cela est encore plus vrai dans la décennie qui nous intéresse61.

C’est donc dans ce contexte tourmenté que l’imprimeur choisit de publier le volume consacré à la guerre de Troie. Simple coïncidence, opportunité, ou acte délibéré en relation avec les difficultés qui s’amoncellent ? A une époque où le grec se répand de plus en plus, et où « la popularité des traductions latines » de ces textes s’estompe62, voire provoque leur disparition, cette reprise de traductions datant pour certaines de plusieurs décennies ne pourrait s’expliquer, si l’on prend en compte l’aspect commercial, que par une hypothétique demande des universités et collèges, mais cela semble une explication insuffisante. Malheureusement pour nous l’ouvrage n’est accompagné d’aucun écrit de l’imprimeur, ni préface, ni adresse au lecteur, ni épître dédicatoire. Nous disposons, comme seuls indices, de la préface de G. Henisch qui a été, partiellement, détaillée plus haut, et de ce qu’on sait de la situation politique en général à la date de la publication. Or, l’ouvrage intervient précisément dans cette période de grandes tensions évoquée ci-dessus et n’y est peut-être pas totalement étranger. La même année 1573, en effet, les deux impressions de Pierre de La Ramée, mort assassiné l’année précédente, deux jours après les massacres de la Saint-Barthélémy, sont une manière supplémentaire pour Perna de défendre l’idéal de tolérance qui lui fut si cher. Les récits liés à la guerre de Troie résonnent par conséquent de manière étrange, presque irréelle, dans cet ensemble éditorial. Parmi les rares textes consacrés à l’Antiquité, on a vu que Plotin faisait en réalité partie, dans l’esprit de l’imprimeur, du combat théologique, lié à la scolastique et à l’aristotélisme. Mais Homère, Dictys, Darès ? A l’aune des informations sur l’époque et l’attitude de Perna, il nous faut revenir à la seule source concrète, la préface de Georg Henisch adressée à Lazare de Schwendi.

En 1573, Henisch, qui n’a que 24 ans, termine ses études de médecine à Bâle, où il obtiendra le grade de docteur en 1576. Est-ce lui – alors qu’il est publié par Perna la même année63 – qui aurait promu cette édition, ou est-ce à Perna que nous la devons pour l’essentiel, cela est difficile à dire, en l’absence de texte complémentaire. Sans doute les deux ont-ils joué un rôle dans cette publication, tant il est vrai que G. Henisch fut également un helléniste, appelé plus tard à donner des cours de grec. On perçoit sa connaissance du grec dans la courte préface de son Enchiridion medicinae, medicamentorum tam simplicium quam compositorum datée de 1573 : il cite deux passages de l’Iliade (XI, 514 et IV, 405) pour appuyer son éloge de la médecine et des médecins, et dans sa dédicace à Lazare de Schwendi dans les récits troyens, il n’hésite pas à convoquer des vers attribués à Orphée. Son intérêt pour l’Antiquité grecque et sans doute plus spécifiquement pour l’Iliade ne peut donc être mis en doute. Quant à Perna, la parution du corpus aristidien sous l’égide scientifique de Canter en 1566 et le soin apporté à cet ouvrage en quatre volumes indique suffisamment qu’il n’était pas indifférent aux textes antiques, même s’il n’avait pas choisi d’en faire son fonds de commerce. C’est donc sans aucun doute la rencontre du jeune étudiant en médecine et de l’imprimeur qui va donner naissance à ce livre, qui, peut-être, arrivait à point nommé pour donner l’image d’un éditeur moins sulfureux et moins suspect.

Et il convient de retourner à la dédicace de G. Henisch pour en proposer une lecture qui pourrait donner une clé de compréhension. La première question, à laquelle il est impossible de donner une réponse définitive, mais qui a son importance, est la raison pour laquelle cette épître est adressée à Lazare de Schwendi. Nous avons eu l’occasion de souligner combien cet homme politique, ce militaire qui combattit sur de nombreux champs de bataille avait aussi été gagné par les idées de respect et de liberté religieuse. Ainsi, après la Saint-Barthélémy il adresse, en 1574, un discours sur la tolérance religieuse (Denkschrift) à Maximilien II, comme il avait semblablement écrit à l’empereur en 1569. Cette missive intervient par conséquent environ une année après l’ouvrage de Perna et sa dédicace. Il serait prétentieux de prétendre que celle-ci a influencé, voire même, donné naissance à celle-là. Cependant, les deux événements, la publication de 1573 et la missive de Lazare de Schwendi, interviennent dans le même contexte historique troublé, avec le même message de paix.

C’est d’autant plus intéressant à observer que, la même année 1573, Henisch traduit, en allemand et latin, le récit historique de la toute récente bataille navale de Lépante (1571) que venait de rédiger Giovanni Pietro Contarini64. On se rappellera que Perna, en 1578 proclame qu’il se contentera dorénavant d’éditer des ouvrages historiques, pour éviter les accusations et procès. Parallèlement, il convient de noter l’insistance de G. Henisch pour situer dans le temps la guerre de Troie et Homère, comme s’il s’agissait précisément d’un récit exclusivement historique. D’apparence, par conséquent, nous serions dans une démarche similaire, consistant à échapper aux maux présents et aux querelles pour ne présenter de façon innocente que de l’Histoire. C’est ainsi qu’il rappelle que la prise de Troie a été située, dès l’Antiquité, de façon extrêmement précise, en l’an 1153 av. J.-C., et environ autant d’années depuis le déluge (post diluvium fere totidem)65. Quant à Homère il vécut 100 années après la destruction de la citadelle troyenne, vulgo creditu, est-il précisé. En effet, Henisch se démarque rapidement de ces estimations pour réaffirmer que l’important pour lui est de dépeindre l’âge héroïque, car une autre vérité doit y être recherchée que dans les récits historiques (alia in hoc quam in historicis veritas requiri debet). L’essence même du message que veut transmettre Henisch se trouve dans l’expression alia veritas : l’ouvrage qu’il présente à Lazare de Schwendi, malgré les apparences pour faire croire à un livre d’Histoire, donne à lire un ensemble de récits reflétant une époque idéalisée, certes, mais qui, essentiellement, s’opposent à la période de sa publication. C’est pourquoi, bien entendu, l’allégorie des trois âges de l’humanité requiert toute notre attention, surtout si y on perçoit l’incontestable référence à l’attelage décrit par Platon dans le Phèdre. Il s’agit bien d’une « fable » sur la condition humaine, sur ses instincts les plus bas, tels que les contemporains de Perna et Henisch pouvaient quotidiennement en avoir des images sous les yeux. On comprend mieux, à l’aune de cette perception, le tableau extrêmement sévère que brosse Henisch des comportements des hommes de la troisième époque où tout n’est que meurtres, tromperies, vols, brigandages et autres infamies. Et c’est au poète qu’il revient de dévoiler la vérité suprême, le beau et le laid de la vie ordinaire, le bon et ce qui est condamnable, car lui seul ne peut être accusé de mensonge. C’est pourquoi si nul esprit sensé ne peut prêter foi à la véracité des récits d’Homère, tout le monde admire l’image si véridique de la vertu militaire dans le personnage d’Achille ou la représentation si vivante de la sagesse dans le personnage de Nestor, et chez d’autres, d’autres exemples soit de vertus soit de vices (tam vera militaris virtutis effigies in Achille, tam vivum sapientiae simulachrum in Nestore, in aliis vero alia tum virtutum tum vitiorum exempla). Henisch par ces propos aborde l’éloge, un tant soit peu convenu, du style homérique, mais son discours garde le fil de la vérité comme repère continu. Et on ne peut s’empêcher d’entendre derrière ces propos une réflexion plus large sur la comparaison qu’il convient de faire entre ces héros, images (effigies, simulachrum) des vertus d’une époque disparue, et la période troublée du XVIe s. La guerre de Troie n’est pas comparable à la bataille de Lépante, elle renvoie une image du courage et de la tempérance qui régnait dans ces temps héroïques, mais ce reflet pourrait bien être, dans l’esprit de Henisch, plus véridique que la vérité de l’Histoire. Le rôle de ces récits est de la sorte essentiel, car, contrairement à ce que le préfacier tentait de faire croire un instant au lecteur, ils n’appartiennent pas à cette Histoire que Perna prétendra vouloir privilégier pour échapper aux secousses de son temps.

Homère, mais aussi Dictys, ou Darès, ramènent au contraire le lecteur à sa propre image, à celle de son époque de violence et d’intolérance par le négatif que révèlent les comportements héroïques de ces temps lointains. Perna, par cette édition, peut échapper à toute censure, tout en répétant son message de paix. Il n’est d’ailleurs pas étonnant qu’aucune des déclamations, pourtant une des originalités de l’ouvrage, ne soit à aucun moment citée dans cette dédicace, car elles ne participent pas directement de ce dessein et ne peuvent avoir le même statut que les récits de l’épisode troyen. Elles jouent plutôt le rôle du « cheval de Troie », permettant de dissimuler, derrière leur apparence anodine de jeu littéraire, le message essentiel du livre. On ne peut s’empêcher de noter que, en 1578 précisément, alors que l’imprimeur proclame sa volonté de se restreindre aux récits historiques, il publie une nouvelle édition des récits troyens. Ne serait-ce pas le témoignage le plus évident que ceux-ci, derrière leur innocence de « monuments littéraires », étaient destinés à pousser la réflexion des contemporains de Perna sur la violence et l’intolérance de leur temps ?

Plusieurs lectures des récits troyens proposés par P. Perna en 1573 peuvent donc être proposées. Tout d’abord, il faut répéter que l’ouvrage fait preuve d’une certaine originalité au sein des éditions de cette époque. En effet, il est unique dans sa composition qui ne sera plus jamais reprise par aucun imprimeur, et à ce titre doit être regardé avec attention. Nul autre livre, ni avant, ni après, ne propose la réunion des textes que nous y trouvons. L’imprimeur bâlois est donc le seul à offrir au lecteur les récits proprement dits de la guerre de Troie, Dictys, Darès, et Homère, mais aussi les déclamations spécifiquement troyennes, et en particulier le groupe des deux mélétai d’Aristide et de Libanios. Peut-être avait-il compris que parmi les nombreuses éditions proposant les traductions de l’Iliade, il lui fallait proposer quelque chose de nouveau, propre à attirer les érudits. Cela n’a été possible que grâce aux relations étroites qu’il entretenait avec les humanistes, que ce soit J. Camerarius, premier éditeur de ces déclamations, ou G. Canter qui en publiera les traductions. Cette caractéristique de l’ouvrage, aboutissement d’une longue chaîne d’éditions, est donc le premier intérêt à relever. Et, si l’on se souvient que plusieurs des publications antérieures de Dictys et Darès avaient vu le jour à Bâle, on peut se dire, qu’il y eut, de la part de Perna, le souci explicite de s’inscrire dans cette tradition, tout en marquant sa spécificité.

Mais, si l’on réfléchit plus avant aux motivations profondes qui ont pu donner naissance à un tel livre, – et sans exclure qu’il ait pu y avoir aussi une intention commerciale, ce qu’on ignore totalement – un second intérêt semble se dessiner. Déjà le titre choisi, original lui aussi par rapport aux précédents ouvrages, dessine une volonté de mettre en avant, non pas tel ou tel auteur66, mais bien un ensemble de textes centrés sur la guerre de Troie. Cet aspect, peut-être loin d’être anodin, pourrait être le signe de l’importance de ce travail pour Perna. En effet, si l’on suit les éditions de l’imprimeur, l’ouvrage se situe en-dehors des champs spécifiques de l’ensemble de sa production jusqu’à cette date. A la question de savoir, dès lors, pour quelle raison, il fait ce choix en 1573, et en se reportant à l’épître dédicatoire de

G. Henisch, on peut être tenté de répondre par certaines hypothèses, liées à la situation politique de l’époque et à la position personnelle de Perna dans cet environnement. Plusieurs indices peuvent en effet laisser conjecturer que les récits troyens arrivaient à point nommé dans une atmosphère qui devenait de moins en moins supportable pour l’éditeur bâlois. Il n’est d’ailleurs pas non plus sans intérêt de noter qu’en 1578, Perna propose à nouveau un ouvrage comportant les récits de Dictys et Darès, l’année même où, nous l’avons vu plus haut, ses démêlés avec les autorités et l’Université de Bâle atteindront leur acmé, après la publication clandestine, d’œuvres posthumes de Sébastien Castellion (Dialogi IIII), au point que l’imprimeur sera emprisonné67. Les récits troyens apparaissent dans des moments de tension, manière détournée peut-être d’adresser le même message de tolérance qui a toujours été celui de l’imprimeur, mais de manière diffuse, moins en vue, et par conséquent moins sujette à des persécutions quelles qu’elles soient, un peu à la manière d’une édition clandestine, comme celle de Castellion qu’il produit en 1578. Les récits troyens sont une sorte de synthèse entre plusieurs préoccupations de Perna, la guerre, lui qui publia Machiavel dont Lazare de Schwendi se revendiqua, la tolérance avec cette insistance dans l’épître sur l’époque de tempérance qui fut celle des héros, l’humanisme enfin, par le retour à l’Antiquité. Celui qui fut, en ces temps troublés, un fervent défenseur de la paix68, a peut-être décidé de transmettre ses idées à travers des récits de guerre. Homère se retrouve, dans ce combat, en première ligne, exemple suprême, guide absolu, comme pour les Anciens.

Note

1 Le titre complet est : Belli Troiani Scriptures Praecipui, Dictys Cretensis, Dares Phrygius § Homerus, omnes iampridem latio iure donati, nunc vero a mendis expurgati, in unum volumen digesti. Additae sunt quoque Libanii et Aristidis declamationes quaedam, historias Troiani belli declarantes.

2 La déclamation 3 (Discours d’ambassade de Ménélas aux Troyens). Les deux déclamations sont reproduites dans une traduction due à Érasme.

3 Dans une traduction de Vincent Obsopoeus.

4 Or. 16 K (Ambassade auprès d’Achille).

5 Déclamation 5 constituée par la réponse d’Achille imaginée par le sophiste d’Antioche. La traduction des déclamations d’Aelius Aristide et de Libanios est à mettre au compte de J. Camerarius.

6 La 3 (voir ci-dessus, note 2) et la 4 (Discours d’ambassade d’Ulysse aux Troyens).

7 Sur certains liens dans des manuscrits anciens, entre l’Iliade latine et les textes de Dictys et Darès on pourra se reporter à Reynolds, Leighton D. (éd.), Texts and Transmission. A Survey of the Latin Classics, Oxford,1983, p. 192 et n. 8.

8 Sur la popularité des récits de Darès et, dans une moindre mesure de Dictys, au moins jusqu’au XIVe siècle, voir Faivre d’Arcier, Louis, Histoire et géographie d’un mythe : la circulation des manuscrits du De excidio Troiae de Darès le Phrygien (VIIIe-XVe s.), Paris, 2006, pp. 15-16.

9 Pour avoir une idée plus précise de ces éditions, se reporter au Gesamtkatalog der Wiegendrücke, Stuttgart, consultable en ligne (http://www.gesamtkatalogderwiegendrucke.de), sous les numéros 7986-7991 et 8327-8328.

10 De son vrai nom Andreas Hartmann, originaire de Strasbourg, où il naît dans la deuxième moitié du XVe siècle., et établi à Bâle comme imprimeur, de 1518 à sa mort (ca. 1540).

11 Voir Gesamtkatalog der Wiegendrücke, n° 8237. L’année suivante l’ouvrage est publié à Venise : GW n° 8328.

12 Il est assez curieux que l’œuvre de Darès ne fasse l’objet d’aucune mention.

13 Scripsit enim ea quae vidit, quibus interfuit, quae gessit.

14 On trouve dans l’édition de Perna, p. 152, une courte « Vie » de Darès due à Raffaelle Maffei (1451-1522) qui indique que le doute sur l’existence de l’auteur de l’Excidium Troiae n’était pas de mise : Dares Phrygius historicus scripsit bellum Troianum graece, in quo ipse militavit. Pour une synthèse de la réception des œuvres de Dictys et Darès et la perception de leur authenticité dès l’Antiquité, on se reportera avec profit à l’ouvrage de Fry, Gérard, Récits inédits sur la guerre de Troie : traduits et commentés, Paris, 1998, pp. 71-85 (Dictys) et pp. 233-235 (Darès).

15 On trouve plusieurs ouvrages concernant ce personnage de première importance, dont l’étude première de Janko, Wilhelm von, Lazarus Freiherr von Schwendi, oberster Fedhauptmann un Rat Kaiser Maximilians II, Fribourg, 2000 (réimpression de l’édition originale de 1871) ; Ott, Hugo, Lazarus von Schwendi (1522-1583), Colmar, 1988 ; Greyerz, Kaspar von, « Lazarus von Schwendi (1522-1583) and late Humanism at Basel », dans M. P. Fleischer (éd.), The Harvest of Humanism in Central Europe. Essays in Honor of Lewis w. Spitz, Saint-Louis (USA), 1992, pp. 179-195.

16 Greyerz, « Lazarus von Schwendi », op. cit., pp. 179 et 186-195, où sont énumérés plusieurs grands noms de l’humanisme du XVIe s., et, de façon plus précise (à partir de la p. 189) la correspondance avec Théodore Zwinger (1533-1588), célèbre médecin, et l’une des personnalités les plus célèbres établies à Bâle, représentant du courant favorable à la tolérance religieuse, tout comme P. Perna dont il fut assez proche.

17 Il fut l’auteur de plusieurs traités, cf. Greyerz, « Lazarus von Schwendi », op. cit., pp. 180-181.

18 Voir Greyerz, « Lazarus von Schwendi », op. cit., pp. 183-186.

19 Il étudia à Bâle à partir de l’âge de 15 ans (cf. Ott, Lazarus von Schwendi , op. cit., p. 14) sous la direction de l’humaniste Simon Grynaeus (1494-1541), puis à Strasbourg avec Jean Sturm, cf. Greyerz, « Lazarus von Schwendi », op. cit., p. 186.

20 On ne trouve le mot que deux fois chez Origène.

21 Même si cela n’est pas dit de façon explicite, il semble évident que G. Henisch dans cette partie de son épître ait en tête l’allégorie de l’attelage décrit par Platon dans le Phèdre (à partir de 246a) pour décrire la nature de l’âme. L’époque des héros, caractérisés par leur tempérance, rappelle le cheval blanc marqué par la σωφροσύνη (253d). Le cheval noir est lui représentatif des désirs et passions humaines que veut rappeler le terme èπιθυμικόν.

22 On retrouve des constatations similaires dans l’adresse au lecteur par F. Faragonius, qui clôt l’ouvrage cité plus haut (édition de 1498), dont le premier vers donne la tonalité : Iam sunt plena malis haec tempora nostra nefandis.

23 De même que les récits de Dictys et Darès étaient perçus comme authentiques à la Renaissance, de même la perception historique de la guerre de Troie était assez commune. Voir par ex. l’attitude de J. Camerarius, commentateur de l’Iliade, Stier, Kurt, « Camerarius als Interpret Homers », dans Kössling, Rainer et Wartenberg Günther (éds.), Joachim Camerarius, Tübingen, 2003, pp. 207-233, notamment p. 227. Mais alors que G. Henisch, dans son épître, situe Homère bien après cet événement, J. Camerarius, au contraire, voulait voir en Homère un témoin relativement proche (ibid.).

24 Voici l’intitulé exact et complet du titre : Dictys Cretensis De Bello Troiano libri VI. Q. Septimio Romano interprete. Daretis Phrygii De Excidio Troiae liber, interprete Cornelio Nepote. Declamationes tres eiusdem fere argumenti, prima Libanii sophistae, reliquae incerti auctoris, ab Erasmo Roterodamo, latio donatae.

25 La déclamation de Libanios est la n. 3, reprise par P. Perna, les deux autres sont intitulées, d’une part Quae dixerit Andromache interfecto Hectore, reprise elle également dans l’édition bâloise de 1473, d’autre part Quae dixerit Medea suos mactatura filios.

26 Utraque ut incerto autore, ita notae multo inferioris.

27 Pour une analyse détaillée de l’ouvrage, voir Vix, Jean-Luc, « Homère à l’épreuve du temps : Aelius Aristide et Libanios préfacés et traduits par J. Camerarius (Haguenau, 1535) », à paraître [2014] dans la collection CBR, éditée par Franz Steiner à Stuttgart, sous le titre « Le sel antique / Salz der Antike ».

28 A la suite de cours qu’il donna à l’université de Tübingen en 1537, il eut le projet de publier un commentaire de l’Iliade, avec une double traduction, en vers et en prose, projet qui ne se concrétisa que pour les deux premiers chants, voir, Stier, « Camerarius als Interpret Homers », op. cit., pp. 207-209 et Ford, Philip, De Troie à Ithaque. Réception des épopées homériques à la Renaissance, Genève, 2007, pp. 33 et 81-84. Il proposa par ailleurs une édition de l’Iliade et de l’Odyssée avec Jacob Micyllus (Moltzer) en 1541, Stier, « Camerarius als Interpret Homers », op. cit., pp. 207-209 et Ford, De Troie à Ithaque, op. cit., p. 110.

29 Pour une vision du parcours éditorial des œuvres d’Aelius Aristide à la Renaissance, voir Vix, Jean-Luc, « Aelius Aristide, égal de Démosthène ? Réflexions sur la réception d’Aristide à la Renaissance », dans Raïos, Dimitri (éd.), ΑΩΑΩΝΗ, ΦΙΛΟΛΟΓΙΑ. In memoriam ΕΜΜΑΝΟΥΛΗΠΑΠΑΜΩΤΗΟΠΟΥΛΟΥ, Ioannina, 2013, pp. 433-452, notamment pp. 441-443. Pour la déclamation de Libanios, voir Foerster, Richard, Libanii opera, vol. V, Leipzig, 1909, p. 302, qui, par méconnaissance de l’ouvrage de Camerarius, pensait que la première édition de ce discours était à mettre au compte de Morel en 1606.

30 Voici la mention figurant en tête du discours 16, p. 337, du T. II : hanc orationem vir doctissimus, Ioachimus
Camerarius, a Vincendo Obsopœo secum communicatam & a se versam, olim separarim edidit, quoniam inter ceteras non extabat. Eam nos cum Aristidis esse nostri, multis indiciis deprehendissemus, instar έρμαιου cuiusdam arripuimus, & cum reliquis una vertimus.

31 Le traducteur de Dictys est Septimius Romanus, celui de Darès Cornelius Nepos.

32 En 1527 paraît à Nüremberg la traduction des chants II et IX, chez l’imprimeur Friedrich Peypus et en 1531 l’atelier de J. Setzer à Haguenau publie un volume comportant les traductions de plusieurs chants de l’Iliade dues à V. Obsopoeus et N. D Valle, dont la traduction du chant I, reprise dans l’édition de P. Perna. Sur les traductions de V. Obsopoeus, voir Ford, op. cit., p. 34.

33 Reprise de la traduction de ces trois chants parue en 1511 à Wittenburg chez J. Groneneberg.

34 On doit à Eobanus Hessus la publication de la première traduction intégrale en vers latins de l’Iliade, en 1540, voir Ford, De Troie à Ithaque., op. cit., p. 34.

35 Perini, Leandro, La vita e i tempi di Pietro Perna, Rome, 2002, pp. 419-505 (Catalogo editoriale).

36 Les numéros donnés entre parenthèses correspondent à ceux de Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., pp. 419-505.

37 Voir Richter, G, Verlegerplakate des XVI. und XVII. Jarhunderts bis zum Beginn des dreissigjährigen Krieges, Wiesbaden, 1965, p. 25

38 D’après Perini, la seule mention de cet ouvrage apparaît dans l’édition de 1583 du recueil de Conrad Gessner, Bibliotheca instituta et collecta primum a Conrado Gesnero, Tirugi [Zürich], 1583, p. 554. Mais à l’examen, si on trouve effectivement la mention d’une édition de La Poétique, traduite en latin par Ludovicus Castelvetrus, parue à Bâle en 1582, il faut noter que le nom de Perna n’est pas mentionné.

39 On peut s’en faire une idée dans Perini, op. cit., pp. 270-302 (Lettere).

40 Ibid., p. 61.

41 Ibid., pp. 61-62.

42 Ibid., p. 92, il ne disposait pas dans la cité helvète, durant ces années, d’un atelier avec tout le matériel approprié dans un local identifié, mais plutôt d’un équipement mobile.

43 Ibid., pp. 139-140.

44 Ibid., pp. 141-142.

45 Voir les quelques lignes consacrées aux publications de Acontius par Perna dans , Buisson, Ferdinand, Sébastien Castellion, sa vie et son œuvre (1515-1565), Genève, 2010 (réimpression de l’édition originale de 1892), vol. II, pp. 291-294.

46 Sur le compagnonnage de Perna, à partir de son départ de Lucques, avec les deux grandes figures du protestantisme que furent Vermigli et Ochino, voir, Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., p. 213.

47 Voir Bietenholz, Peter, Der italienische Humanismus und die Blütezeit des Buchdrucks in Basel, Bâle-Stuttgart, 1959, pp. 149-150.

48 Ibid., pp. 159-160.

49 Il publiera à plusieurs reprises les traités de Paracelse (voir à ce sujet le chapitre intitulé « Un laborario achimistico », dans Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., pp. 149-160) et fut en contact étroit avec Théodore Zwinger, médecin et scientifique établi à Bâle, voir Kahn, Didier, Alchimie et paracelsisme en France à la fin de la Renaissance, 1567-1625, Genève, 2007, p. 212 et Buisson, Sébastien Castellion, op.cit., p. 92.

50 D’après Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., p. 162, sans doute le hasard de ses lectures, peut-être par l’intermédiaire de Pétrarque.

51 Peut-être en souvenir du financement de la toute première édition de Plotin par Laurent de Médicis. Voir, Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., p. 120.

52 Épître adressée aux Amplissimis viris consulibus et senatoribus illustris reip. Norimbergensis.

53 Voir Rotondò, Antonio, Studi e ricerche di storia ereticale italiana del Cinquecinto, Turin, 1974, p. 278. Le texte de cette épître est reproduit dans Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., pp. 361-366.

54 Voir à ce sujet Rotondò, Studi e ricerche, op. cit., pp. 273-275.

55 Il « entra comme professeur à l’Université » de Bâle en 1553, Buisson, Sébastien Castellion, op. cit., p. 92.

56 D’après le décompte de Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., pp. 460-465.

57 C’est en 1560 que Perna publie pour la première fois un ouvrage d’alchimie, intitulé Compendium Alchimiae. Sur la continuité éditoriale de Perna dans ce domaine voir Kahn, Alchimie et paracelsisme, op. cit., pp. 104-108 et p. 206 où l’auteur parle au sujet de cette année 1573 de « frénésie éditoriale ».

58 L’ambassadeur du roi de France près des Ligues Grisonnes.

59 […] nescio quibus argumentis librum sic suspectum nostratibus medicis reddidit, ut paucis post diebus ab ipso transferri, et a me excudi prohiberent censores. On trouve une traduction française de cette épître dans Kahn, Alchimie et paracelsisme, op. cit., p. 209-211.

60 Kahn, Alchimie et paracelsisme, op. cit., p. 212.

61 Voir Rotondò, Studi e ricerche, op. cit., p. 275. Perna n’est évidemment pas le seul en butte à la censure ; en 1567 interdiction est faite à Oporin de publier les Sylvae d’Andrzej Rrycz Modrzewski (ibid.).

62 Ford, De Troie à Ithaque, op. cit., p. 163.

63 Enchiridion medicinae, medicamentorum tam simplicium quam compositorum.

64 Historia von dem Krieg welchen newlich der Türkisch Keiser Selim der ander wieder die Venediger erreget hat.

65 Les lignes qui suivent sont une paraphrase plus qu’une traduction fidèle de la préface de Henisch.

66 Les éditions antérieures ont généralement pour début de titre Dictys cretensis de bello troiano.

67 Voir Buisson, Sébastien Castellion, op. cit., p. 317.

68 Voir Perini, La vita e i tempi di Pietro Perna, op. cit., p. 163.

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Jean-Luc Vix, « Les héros de la guerre de Troie comme exempla ? Réflexions autour d’une édition de 1573 », Atlantide [On line], 2 | 2014, On line dal 01 décembre 2014, ultima consultazione: 09 octobre 2025. URL : https://atlantide.pergola-publications.fr/index.php?id=352

Autore

Jean-Luc Vix

Maître de Conférences HDR en langue et littérature grecques à l’Université de Strasbourg, ses recherches portent sur la littérature d’époque impériale (L’enseignement de la rhétorique au IIe s. ap. J.-C. à travers les discours 30-34 d’Aelius Aristide, Turnhout, Brepols, 2010) et sur la transmission et la réception des textes de l’Antiquité (« Aelius Aristide, égal de Démosthène ? Réflexions sur la réception d’Aristide à la Renaissance », ΔΩΔΩΝΗ, Φιλολογία. In memoriam Εμμανουλη Παπαθωμοπουλου, D. Raïos éd., Ioannina, 2013 ; « Homère à l’épreuve du temps : Aelius Aristide et Libanios préfacés et traduits par J. Camerarius (Haguenau, 1535) », à paraître [2014] dans la collection CBR, éditée par Franz Steiner à Stuttgart, sous le titre Le sel antique / Salz der Antike ; « Les déclamations grecques : questionnements sur le genre au XVIe s. », actes du colloque tenu à Clermont-Ferrand et Strasbourg en 2012, à paraître dans la collection Caesarodunum - Présence de l’Antiquité.

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