Rencontre militaire : hasard de l’affrontement dans l’historiographie française de la seconde moitié du XVIe siècle

DOI : 10.56078/atlantide.757

Résumés

Dans cet article, le terme rencontre est considéré dans son acception militaire, à partir d’une définition proposée par Jean Nicot dans son Trésor de la langue française. Ses usages sont ensuite étudiés dans l’historiographie de la seconde moitié du xvie siècle (La Popelinière, Vigenère, Belleforest, Du Haillan, L’Estoile…), dans le but d’évaluer la stabilité de la notion au sein de ces textes et de questionner le rapport qu’elle entretient avec le hasard comme imprévu et comme danger. Après avoir établi les caractéristiques récurrentes de la rencontre en tant qu’affrontement, chez Froissart puis dans le corpus, on interroge son caractère « douteux » : d’abord comme catégorie incertaine du vocabulaire militaire, puis comme pratique guerrière qui paraît exposer davantage aux périls que d’autres formes de combat. Liée à l’instabilité du fait militaire, au renversement du rapport de force et à la surprise, le rencontre peut en fait relever de la ruse de guerre et garantir une meilleure maîtrise du risque.

In this article, the word rencontre is considered in its military sense, starting from a definition given by Jean Nicot in his Trésor de la langue française. The uses are studied in the historiography of the second half of the 16th century (La Popelinière, Vigenère, Belleforest, Du Haillan, L’Estoile…) to assess the stability of the notion in these texts and to question its relationship to chance as unforeseen and as danger. After having established the recurrent features of rencontre as encounter, in Froissart and in the corpus, we examine its “doubtful” nature: first as an uncertain category of the military vocabulary, then as a warlike practice which seems to expose more to perils than other forms of fight. Linked to war instability, reversal of the power balance and surprise, rencontre can actually prove a stratagem and ensure a better risk control.

Plan

Texte intégral

Jean Nicot, dans un article du Trésor de la langue française (1606, posthume, p. 555), fait de la rencontre une catégorie militaire à la fois précise et paradoxale. Le mot rencontre n’est ni un terme spécifique au vocabulaire militaire, ni un mot propre à la langue du xvie siècle. Attesté en français dans la première moitié du xiiie siècle avec le sens particulier d’« action de combattre », il est un déverbal de rencontrer, lui-même attesté au sens d’aller « contre » l’ennemi dès le début du xiie siècle, selon le Dictionnaire du moyen français1. Il peut être masculin ou féminin en ancien français et encore en français préclassique. L’article de Nicot propose une première définition générale du terme, puis une définition spécialisée qui concerne le « fait militaire » (Guerrier, 2016, p. 23-28). La rencontre constitue selon le philologue un type d’affrontement qui se caractérise par sa moindre envergure – elle oppose des troupes et non des armées entières – et par son caractère imprévu, ce que soulignent à la fois l’adverbe « adventurierement » et l’adjectif « inopiné ». Nicot donne ensuite à la rencontre une place dans la hiérarchie des différentes formes d’affrontement grâce à deux oppositions structurantes.

La rencontre est d’abord dissociée de la bataille. Si rencontre et bataille sont toutes deux des « espèces de conflit campal » (qui ont lieu en rase campagne), la rencontre ne concerne qu’une seule partie de l’armée qui est allée « quer[ir] l’aventure », s’exposant ainsi à un risque qu’elle ne maîtrise pas tout à fait, et qui participe finalement à un « combat tumultuaire » (désordonné). La bataille, elle, concerne toute l’armée et nécessite des bataillons « ordonnez et rangez » – ce qui explique qu’on l’appelle aussi bataille rangée. Nicot souligne d’ailleurs que « tenir l’armée en bataille est la tenir ordonnée par esquadrons et rengée ainsi que chacun doit combattre ». La rencontre se distingue également d’un ensemble d’actes de guerre mineurs, quoiqu’ils puissent être violents et efficaces pour emporter la victoire, à savoir les « courses », les « ribleries », les pillages et autres formes de dégâts matériels.

Cette caractérisation a priori claire est rendue incertaine par le paradoxe sur lequel repose la définition générale fournie en amont par Nicot : la rencontre est en effet à la fois imprévisible et recherchée ; elle « presuppose adventure », donc soumission à l’inattendu, mais « s’offre avec pourchas », grâce à un effort, voire grâce à une poursuite, une chasse2. Nicot illustre sa définition à l’aide de deux exemples empruntés aux Annales de Nicole Gilles (1525, posthume) : celui de la « Journée des Éperons » (1513) et celui de l’invasion par les troupes de Charles Quint de la Champagne et de la Picardie, dans le cadre de la neuvième guerre d’Italie (1544). Il paraît donc intéressant de mettre cette caractérisation de la rencontre militaire à l’épreuve de récits historiques plus nombreux et contemporains du travail du philologue, c’est-à-dire publiés dans la seconde moitié du xvie siècle, afin d’en évaluer la pertinence.

Dans quelle mesure la rencontre forme-t-elle une catégorie stable au sein de ces textes ? Quel rapport entretient-elle en particulier avec le hasard comme surgissement de l’imprévu, tel que nous le concevons, et comme danger auquel on peut plus ou moins sciemment s’exposer, tel que la langue du xvie siècle l’entend le plus souvent ? Ce double questionnement permettra d’étudier une forme de représentation de la violence armée et de scruter à travers elle la manière dont les récits d’histoire usent de catégories partagées – qui peuvent devenir des lieux communs – pour dire et juger des pratiques militaires (Fontaine & Fournel, 2015 ; Deruelle et al., 2021). L’affrontement sera considéré comme un événement relevant non du donné mais du construit, forgé notamment par les écrits qui le relatent a posteriori (Boltanski, Lagadec et Mercier, 2015). Notre enquête lexicale permettra de s’attacher en particulier aux représentations de la « petite guerre », entendue comme « l’ensemble des opérations se déroulant en marge des batailles et des sièges », qui ont notamment pour but de pourvoir aux besoins d’une armée et de nuire à l’adversaire (Deruelle, 2017, p. 14), en amont de ses premières théorisations au xviie siècle3.

Après avoir établi les caractéristiques récurrentes de la rencontre en tant qu’affrontement entre le xive et le xvie siècle, on interrogera son caractère « douteux » : d’abord comme catégorie incertaine du vocabulaire militaire, puis comme pratique guerrière qui pourrait exposer davantage aux périls que d’autres formes de combat.

1. Les caractéristiques récurrentes de la rencontre

1.1. Dans les Chroniques de Jean Froissart (xivsiècle)

Avant d’étudier les récits militaires publiés dans la seconde moitié du xvie siècle, il est utile de disposer d’un point de repère au sein de l’historiographie médiévale, que peuvent offrir les Chroniques de Jean Froissart. Ces dernières, qui relatent les événements de la guerre de Cent ans se déroulant entre 1326 et 1400, sont encore lues et appréciées par les humanistes et leurs héritiers4.

Au début du prologue du manuscrit d’Amiens, Froissart explique que l’on trouvera au sein de son ouvrage « de grans fais d’armes, de mervilleuses avenues (événements), de durs rencontres, de grandes bataillez », dont la connaissance sera utile pour « tout jone gentil hommez qui se desirent à avanchier » (Chroniques, Amiens 486, §1). La rencontre, en ce qu’elle contribue à fonder l’intérêt du récit, en particulier pour un lectorat ambitieux mais encore inexpérimenté, ne constitue donc pas une modalité négligeable du combat et mérite d’être remémorée. Après avoir rappelé les noms de combattants anglais et français exemplaires, le chroniqueur précise bien que l’on doit « tenir pour preux, voire pour doubles preux » tous ceux qui « se sont trouvé si souvent en ces grands batailles et fort et durs rencontres » que les Chroniques s’apprêtent à relater. Bataille et rencontre sont réunies par le fait qu’elles offrent aux hommes la possibilité de faire la preuve de leur valeur, peut-être de trouver une « belle mort » au combat (Germa-Romann, 2001).

Bien que le prologue des Chroniques diffère nettement dans le texte donné par Denis Sauvage (1559-1561), l’association de la rencontre à des adjectifs soulignant sa brutalité est également récurrente au fil du récit proposé dans cette édition du xvie siècle. Tandis que les batailles sont dites « grand’ », « grosse » (Froissard, 1559-1561, t. I, p. 154 ; p. 286) ou « rengée et arrestée » (t. I, p. 3), les rencontres sont plus souvent qualifiées de « dures » ou de « fortes » (t. I, p. 78 ; t. II, p. 245 ; t. III, p. 58). Si elles n’ont pas pour caractéristique le nombre et l’organisation des troupes, elles peuvent être redoutables et provoquer de multiples morts et blessés. Le terme est, de fait, parfois rapproché de mots qui désignent des types d’affrontement brefs mais violents tels qu’« assaux » (t. I, p. 145), « écarmouches » (t. I, p. 259), « embusches » (t. III, p. 243) ou « hustins » (mêlée violente et bruyante) (t. I, p. 354). La rencontre est également liée aux chevauchées, la mobilité et la rapidité accrues des hommes à cheval permettant des affrontements ponctuels. Elle peut enfin se dérouler en mer (t. I, p. 265 ; t. III, p. 293) et n’est donc pas exclusivement « campal » sous la plume de Froissart.

1.2. Dans l’historiographie française de la seconde moitié du xvie siècle

Dans les ouvrages d’histoire de la seconde moitié du xvie siècle, la rencontre constitue encore un type d’affrontement intermédiaire, comme l’illustrent deux citations empruntées à Lancelot Voisin de La Popelinière, homme de lettres après avoir été homme de guerre. L’historien glose le sous-titre italien du traité d’art militaire de Bernardino Rocca qu’il traduit (Imprese, stratagemi, et errori militari divise in tre libri, 1566), précisant que Des entreprises et des ruses de guerre donne « les moyens de bien faire la guerre », notamment « pour emporter l’avantage tant es Escarmouches, surprises, rencontres, que batailles assignées » (Rocca/La Popelinière, 1571, page de titre). Contrairement à la bataille, dont le jour et le lieu peuvent être déterminés, la rencontre relève de la catégorie des combats inattendus pour au moins un des deux camps, à la manière de la surprise, qui consiste à s’emparer d’une troupe ou d’une ville sans que celles-ci s’y attendent ; elle est également brève, localisée et n’implique qu’un nombre réduit de soldats, à la manière de l’escarmouche. Dans l’Épître à la noblesse qui ouvre La Vraye et Entiere Histoire des troubles, le mot est employé dans un passage annonçant le contenu du livre, qui décrira notamment les « attaques, surprinses, rencontres, batailles » des débuts de la guerre civile (La Popelinière, 1572, f. *** ii r°). Le substantif sert cette fois de moyen terme entre des formes occasionnelles de combat et des manifestations plus structurées de celui-ci.

Comme sous la plume de Froissart, la rencontre peut être violente et meurtrière. Dans sa traduction des Démonstrations historiques de l’historien byzantin Laonicos Chalcondyle (av. 1490), Blaise de Vigenère fait d’un combat entre les Turcs et des « Scythes » « en assez petit nombre » une « fort lourde et dangereuse rencontre », dans laquelle ces derniers « eurent le dessus, et tuerent presque tous les autres » (Chalcondyle/Vigenère, 1577, I, 4, p. 19), mettant un terme à une première percée ottomane en Europe au début du xive siècle5. François de Belleforest, dans ses Grandes Annales (1579), relate quant à lui l’affrontement de Mons-en-Pévèle du 18 août 1304 comme une suite de deux « rencontres »6 : « les Flamands furent durement traictez, perdant plus de dix mille hommes au premier conflict et rencontre : et si la cavalerie [française] eut peu aller et venir à son aise, il ne fut pas demouré un seul Flamand sur la place » (Belleforest, 1579, t. I, IV, f. 778 v°). À l’issue de la seconde « rencontre », le nombre de morts est multiplié par deux selon l’historien, tant les adversaires de Philippe le Bel « estoient acharnez » (f. 779 r°).

Parfois fort dommageable et déterminante pour la suite de la guerre, la rencontre est alors mémorable. Elle peut recevoir un nom, comme c’est le cas dans les Annales et Croniques de France de Gilles, qui désigne la « rencontre » de Guinegatte (16 août 1513) comme la « Journee des Esperons » (Gilles, 1562, t. II, f. 137 r°), dénomination faisant référence au comportement des troupes de Louis XII, qui ont davantage fait courir leurs chevaux qu’ils n’ont manié l’épée face à l’ennemi anglo-germanique. Plus généralement, comme pour les batailles, la rencontre peut recevoir son nom du lieu où elle s’est tenue : Vigenère évoque ainsi la « rencontre de Varne (Varna) » de 1444 (Chalcondyle/Vigenère, 1577, VII, 7, p. 469) et La Popelinière relate la « rencontre de saint Cler (Saint-Clair) » de 1569 dans son Histoire de France (La Popelinière, 1581, t. I, XIX, f. 132 v°).

La rencontre est enfin encore considérée comme le moment possible d’une démonstration de bravoure, ainsi que le défend Pierre de Bourdeilles, dit Brantôme, lui-même militaire de carrière. Dans ses Vies des grands capitaines (av. 1609), au sein du récit consacré au roi d’Espagne Philippe II, il écrit que les rois ne doivent

[…] advanturer [leurs vies] à tous hurtz et occasions légères, mais à d’autres belle et de très grandes, que si le malheur veut qu’ilz y meurent, on die d’eux qu’ilz sont mortz en une belle bataille ou en un’ honnorable rencontre, ou signallé combat, bravement et vaillamment les armes au poing, toutes tainctes de sang, comme plusieurs grands empereurs et roys ont faict, dont le nombre est infiny. (Brantôme, 1869, I, 24, t. II, p. 73)

Brantôme considère qu’une rencontre peut garantir une belle mort à un prince, au même titre qu’une bataille, tant que celle-ci respecte les codes de l’honneur chevaleresque – qui structurent encore fermement les pratiques et l’imaginaire militaires au xvie siècle (Deruelle, 2015) – et que le prince lui-même s’y comporte avec courage. Cet argumentaire, qui incite en fait les souverains à préserver leur vie, tente de justifier le peu de présence sur le champ de bataille de Philippe II, roi « bureaucrate » plutôt que chef de guerre (Capitaine-Baron, 2003, p. 87).

Dans ses Commentaires (1582), Blaise de Monluc envisage, quant à lui, les rencontres comme une source de bonne réputation pour les petits capitaines : « Et toute la reste ne sont qu’escaramoches ou rencontres qui ne servent que particulièrement à nous, et pour nous fere cognoistre et estimer de noz supérieurs, et acquérir de l’honneur pour nous » (Monluc, 1582/1964, p. 363). La rencontre permet à un individu lambda de faire reconnaître les manifestations de son courage, condition de l’appartenance à la noblesse (Jouanna, 1976) ; le vieux maréchal conseille d’ailleurs aux jeunes soldats de s’engager fermement aux « premiers rancontres où il se trouveront », parce qu’ils y seront évalués avec attention, voire avec sévérité (Monluc, 1582/1964, p. 31). Mais, sauf si elle s’avère déterminante, la rencontre n’offrira guère aux petits capitaines que l’estime de leur hiérarchie la plus directe : dans Les Essais, au chapitre « De l’institution des enfans », Montaigne tempère l’aspiration à la gloire des plus modestes en rappelant que toutes les victoires passées déjà oubliées « rendent ridicule l’esperance d’eterniser nostre nom par la prise de dix argoulets (archers), et d’un pouillier (poulailler), qui n’est cognu que de sa cheute » (Montaigne, 1580-1595/2007, p. 164).

Les caractéristiques de la rencontre déterminées à partir des Chroniques de Froissart sont donc encore bien présentes dans l’historiographie de la seconde moitié du xvie siècle. Mais certains usages du terme, qui l’assimilent à l’escarmouche ou le rapprochent de la bataille, semblent parfois le départir de ses spécificités.

2. Une notion « douteuse » ?

2.1. Un terme français sans équivalent précis en italien, en latin et en grec

Désignation d’affrontements allant de l’engagement léger au choc de deux armées, le substantif rencontre est employé au gré d’un certain flou notionnel. Cette souplesse s’explique peut-être par le fait qu’il n’est pas l’équivalent précis d’un terme dans les langues essentielles pour penser la guerre au xvie siècle (Guerrier, 2016, p. 31) : le latin et l’italien, dont le vocabulaire militaire n’est lui-même pas stabilisé (Pretalli, 2020), ainsi que le grec, dans une moindre mesure.

Dans les traductions de César et de Chalcondyle proposées par Vigenère, rencontre est une traduction possible du latin proelium7, qui a le sens très large de combat. Dans le texte original de l’historien byzantin, il correspond au verbe grec μάχομαι (combattre), mais il appartient aussi parfois à des passages ajoutés par le traducteur8. Dans les traductions des œuvres de Plutarque par Jacques Amyot, rencontre rend le grec μάχη (guerre) ou ἱππομαχία (combat de cavalerie) ; il permet également de traduire le sens des verbes μάχομαι et συμπίπτω (tomber sur, en venir aux mains)9.

Pour ce qui concerne l’italien, Jean Charrier, traduisant L’Art de la guerre de Machiavel (1546), use à quelques reprises de rencontre pour traduire « primo assalto » (« premier assaut et rencontre »), « primo scontro (choc) » et « primo impeto (élan) »10. Dans tous les cas, le substantif renvoie non pas à une opération militaire mineure mais à la première confrontation des troupes lors d’une bataille. Dans Des entreprises et des ruses de guerre de Rocca traduit par La Popelinière, le substantif correspond également à des mots italiens variés comme assalto, battaglia ou guerra11.

Chez Jérôme Chomedey, traduisant pour sa part L’Histoire d’Italie de Guichardin (1568, 1577, 1593), rencontre traduit le verbe combattere, l’emploi au sens figuré d’appiccare (attaquer), ainsi qu’une grande variété de substantifs : battaglia (bataille), scontro (choc), contrasto (conflit), fatto d’arme (fait d’armes) ou congresso (du latin congressio : rencontre, combat)12. En doublon avec « impedimento », le terme renvoie parfois à un simple « empeschement » qui aurait pu avoir freiné une progression13. Comme dans la traduction de Machiavel par Charrier, il peut désigner le premier choc des troupes mais aussi un affrontement tout entier – dans le cas, par exemple, du sac de Brescia (1512) ou de la bataille de Pavie (1525)14. Enfin, rencontre est la traduction de riscontro – déverbal de riscontrare, comme rencontre dérive de rencontrer – quand le substantif désigne, dans de très rares cas, un combat de moindre envergure, opposant notamment des « cavalli leggieri » (« chevaux legers »15). Les occurrences sont toutefois suffisamment rares pour qu’il ne soit pas possible de parler d’équivalence systématique entre riscontro et rencontre, qui traduit une importante variété de termes du vocabulaire militaire italien.

2.2. Synonymies et équivalences en français

Au-delà du cadre des traductions, ce flou notionnel se manifeste par des doublons synonymiques qui font de rencontre un équivalent de course ou d’escarmouche. Belleforest assimile dans une énumération le terme aux poursuites à cheval : « se passa toute celle année en courses et rencontres, sacs, pillages, et infinité de meurtres par les frontieres » (Belleforest, 1579, t. I, II, f. 319 r°). La rencontre est même associée à des pratiques de « grevances » que Nicot estimera distinctes dans l’article de son dictionnaire. La Popelinière, lui, use de formule comme « le jour de l’escarmouche et rencontre » (La Popelinière, 1572, f. 161 r°) ou « plusieurs escarmouches et rencontres » (La Popelinière, 1581, t. II, 37, f. 221 v°).

Mais sous la plume de l’historien protestant, le mot escarmouche – dont l’étymologie est incertaine16 – et le terme rencontre sont l’un et l’autre employés le plus souvent seuls. Surtout, les rapprochements ponctuels n’excluent pas un souci de précision, ainsi que le montre son analyse de la rencontre de Saint-Clair (30 septembre 1569)17, qui est nettement distinguée d’un simple accrochage :

Et de fait, dès la charge de saint Cler (que je nomme Rencontre plustost qu’escarmouche, tant pource que plus de la moitié des deux Avantgardes combatit, et se mesla furieusement : Joint le Canon qui joüa si à propos : que pource qu’en escarmouches on ne se mesle pas coustumierement et sont plus attaques particuliere, de deux à deux, sept à sept, ou autre tel nombre, que de la moitié d’une armée : aussi que le Canon n’y vuide point tels differens) les Protestans commencerent à s’estonner […]. (La Popelinière, 1581, t. I, XIX, f. 132 v°)

La parenthèse vient rétablir une hiérarchie : la rencontre implique davantage de troupes engagées que l’escarmouche, ainsi qu’une « mêlée », généralement source de désordre ; l’emploi du canon est également un critère de distinction. Cette caractérisation offerte par La Popelinière est confortée par la traduction de Vigenère, qui redouble à deux reprises « escarmouches » par la formule « legeres rencontres » (Chalcondyle/Vigenère, 1577, I, 10, p. 55 ; II, 7, p. 104) et qui fait a contrario de « grosses rencontres » un synonyme de « bataille » (César/Vigenère, 1576, VII, p. 335).

À l’opposé de l’escarmouche, la rencontre peut donc aussi être un équivalent de la bataille. Gilles donne à l’affrontement qui oppose à Guinegatte les troupes de Louis XI à celles de Maximilien d’Autriche, le 7 août 1479, deux désignations distinctes : celui-ci est qualifié de « bataille » en manchette, mais ensuite de « rencontre » dans le corps du texte (Gilles, 1562, t. II, f. 120 r°-v°). Ironiquement, la qualification fluctuante de la première bataille de Guinegatte (1479) rend suspecte la définition que Nicot exemplifie grâce au récit de la seconde bataille du même nom (1513). De même, Vigenère écrit que face à deux seigneurs ennemis Bajazet « fut deffait et perdit la bataille, où il y eut une dure rencontre » (Chalcondyle/Vigenère, 1577, II, 3, p. 86).

À nouveau, néanmoins, les caractéristiques de la rencontre ne se diluent pas nécessairement du fait de ce type de rapprochement. Dans la traduction de L’Art de la guerre de Jean Charrier, on l’a dit, le rencontre peut désigner un premier choc. Dans Les Essais de Montaigne18, la bataille de Crécy (26 août 1346) devient rencontre quand est considérée l’action de l’avant-garde, c’est-à-dire des troupes qui se déplacent avant l’armée et peuvent rencontrer l’ennemi de manière inopinée : « En la bataille de Crecy, le Prince de Gales, encores fort jeune, avoit l’avant-garde à conduire : le principal effort du rencontre fust en cet endroit » (Montaigne, 1580-1595/2007, I, 41, p. 279). La bataille est qualifiée de rencontre parce que la victoire s’est jouée avant l’engagement de l’armée dans son ensemble. Dans L’Histoire des neuf roys Charles de France, au sujet de la bataille de Dreux (19 novembre 1562), Belleforest décrit les deux armées face à face, « se regardans l’un l’autre, attendans l’heure de chamailler », puis raconte la première charge pour conclure, avec la capture d’Anne de Montmorency, qu’« en ce rencontre fust pris et blessé monsieur le Conestable au grand estonnement de toute la bataille » (Belleforest, 1568, p. 543). La bataille correspond aux deux armées en ordre ; le terme rencontre permet, lui, de dire le choc des troupes qui sont engagées dans la charge, comme c’était déjà le cas pour l’exemple de Mons-en-Pévèle analysé plus haut.

2.3. Une notion relative

Ce dernier exemple rappelle que l’historiographie est une construction langagière établie a posteriori, dans laquelle le vocabulaire employé dépend du point de vue adopté sur les événements (Veyne, 1971/1996, p. 174-191). Une rencontre peut devenir bataille ou journée quand elle est jugée suffisamment marquante ou décisive après coup : Jean Du Tillet, dans son Recueil des guerres et traictez d’entre les roys de France et d’Angleterre (1588), rappelle en une apposition que « la rencontre pres de Rouvray en Beaulse » qu’il s’apprête à relater brièvement a été « appellée la bataille des Harens » (12 février 1429) ; le convoi anglais attaqué par les Français transportait en effet du poisson et autres « provisions de Karesme » (Du Tillet, 1588, f. 128 r°). Pierre de L’Estoile, dans son Registre-Journal du règne de Henri III (1621, posthume) marque bien la distance temporelle entre deux dénominations d’un même évènement par l’emploi de l’adverbe « depuis » : « Le mardi 20e [octobre 1587], advinst le combat et cruelle rencontre du Roy de Navarre et du duc de Joieuse à Coutras, qu’on a depuis apelée la journée de Coutras, en laquelle l’armée dudit duc de Joieuse fust entièrement rompue et desfaite […] » (L’Estoile, 1621/1996-2006, t. V, p. 318). À la faillite des troupes catholiques, s’ajoute encore la mort d’Anne de Joyeuse lui-même, abattu d’un coup de pistolet une fois fait prisonnier, qui contribue à faire de cet épisode un moment important de la huitième guerre de Religion. Dans L’Histoire de France de La Popelinière, la réévaluation se fait en manchette : la « rencontre » de Mookerheide (14 avril 1574), considérée comme « memorable », devient dans la marge la « Bataille où le Comte Ludovic et le fils du Comte Palatin19 furent tuez par les Espagnols » (La Popelinière, 1581, t. II, XL, f. 298 r°).

Dans L’Histoire de France de Bernard de Girard Du Haillan (1576), la dénomination n’est pas une question de temps mais de nationalité : comme une victoire est toujours l’envers d’une défaite, un affrontement peut être bataille pour un camp et rencontre pour l’autre. Dans le récit du règne de Philippe Le Bel, l’historien relate l’affrontement qui oppose, le 20 août 1297, à Furnes, Robert II d’Artois au comte de Flandres Gui de Dampierre :

[…] le Comte Guy assailli de tous costez, envoya une grosse troupe de gens de pied et gens de cheval contre ledit Comte d’Artois, qui pres de la ville de Furnes fut rencontré par les Flamans, lesquels en ceste rencontre appellée par les Flamans bataille furent tous, ou tuez ou mis en fuitte. (Du Haillan, 1576, XII, p. 657)

Le substantif rencontre – retenu par Du Haillan pour qualifier le combat – apparaît comme ce qu’il est sur le plan grammatical : un déverbal du verbe rencontrer, qu’il suit de peu dans la phrase et qui permet lui aussi de décrire la confrontation des troupes. Si d’après l’historien les Flamands font de l’affrontement de Furnes une bataille, certainement est-ce du fait de ses conséquences désastreuses et parce qu’il se déroule sur leur propre territoire.

Les synonymies et les équivalences qu’établissent les récits ne traduisent donc pas une profonde ambiguïté lexicale du substantif rencontre mais une relative souplesse de la typologie des affrontements, dans laquelle la rencontre est une notion commode pour désigner un ensemble de formes intermédiaires. Cette conclusion recoupe le constat plus large selon lequel « petite et grande guerre ne sont pas distinguées » nettement au xvie siècle par des définitions normatives (Deruelle, 2017, p. 20). La superposition des notions ou le changement de qualificatifs traduisent parfois moins l’indifférence ou l’hésitation de l’historien qu’un souci de précision pour désigner des modalités différentes du combat ou pour proposer plusieurs regards sur un même événement. La rencontre est une catégorie « douteuse », non parce qu’elle est profondément énigmatique ou instable, mais parce qu’elle laisse place à interprétation et qu’à travers elle peut s’exprimer un jugement.

3. Une modalité hasardeuse de la guerre ?

Par-delà la diversité des usages, c’est bien la rencontre elle-même qui est tenue pour un type d’affrontement « doubteux », selon le mot de Vigenère dans sa traduction de Chalcondyle (1577, I, 13, p. 71), ou « hasardeux », comme l’écrit René de Lucinge dans La maniere de lire l’histoire (1614, p. 133). La rencontre est, on l’a dit en introduction, recherchée par les troupes mais inattendue au moment même où elle débute, au moins pour un des deux camps, davantage que la bataille rangée qui nécessite une organisation des troupes et d’importants moyens logistiques. Ceci explique que, « point culminant » et « épisode capital » de toute campagne, les batailles soient demeurées rares, tant pendant la guerre de Cent ans que pendant les guerres de Religion (Contamine, 1980/1999, p. 379 ; Le Roux, 2014).

3.1. Incertitude et instabilité

Quand elles sont envisagées dans leur succession au sein d’un même conflit, les rencontres permettent de dire l’issue toujours incertaine de la guerre. Dans sa traduction de L’art de la guerre, Jean Charrier rend la formule « uno primo impeto (élan) e a une prima fortuna » par « une premiere fortune et rencontre » (Machiavel, 1546, III, 7, f. 44 r°), expression qui unit le choc initial des troupes, désigné par le second terme, à la confrontation hasardeuse à l’adversité, désigné par le premier.

Dans son récit du règne de Louis VI le Gros, Du Haillan rappelle, pour sa part, que les rencontres, surtout lorsqu’elles sont de moindre ampleur, ne garantissent pas la victoire décisive d’un camp, qui viendrait mettre un terme au conflit : le roi de France et Guillaume II d’Angleterre « combattirent souvent l’un contre l’autre, en diverses et petites rencontres, sans que l’un emportast grand cas sur l’autre à cause que tantost la fortune secondoit l’un, tantost l’autre, et qu’en fin le Gros accorda audit Guillaume, que Gisors ne seroit point demoly » (Du Haillan, 1576, VII, f. 392 r°). Par opposition aux multiples rencontres, la formule « grand cas » désigne un fait d’armes décisif qui n’a pas eu lieu ; la diplomatie viendra résoudre le conflit.

Dans ce passage, Du Haillan prête à la fortune un rôle topique : celle-ci est présentée comme la force qui entretient le conflit par le soutien ponctuel qu’elle accorde à un camp, puis à l’autre. Depuis l’Antiquité, et encore au moment où font rage les guerres de Religion, la figure incarne le « train inconstant » de la guerre autant que la limite des capacités humaines de prévision et d’action (Viaud, 2021). Par ce type d’usages, la fortune concourt, au xvie siècle, à un phénomène d’atténuation de l’interprétation providentialiste de la victoire et de la défaite, qui sont moins perçues comme des signes de Dieu que comme des situations concrètes toujours réversibles (Le Gall, 2016). Montaigne dénonce ainsi « ceux qui eurent l’avantage au rencontre de la Rochelabeille » (25 juin 1569) et qui, « faisans grand feste de cet accident », « se serv[irent] de cette fortune, pour certaine approbation de leur party » (Montaigne, 1580-1595/2007, I, 31, p. 223), oubliant bien vite les défaites de Moncontour et de Jarnac. Le terme rencontre, redoublé par celui d’accident, contribue à exprimer un refus : celui que les protestants fassent d’une victoire ponctuelle la manifestation d’un jugement divin, et à dénoncer plus largement toute instrumentalisation de la Providence à des fins partisanes.

3.2. Disproportion et renversement inattendu du rapport de force

Une autre manifestation du caractère « hasardeux » de la rencontre est la possible disproportion de ses conséquences par rapport à son ampleur. L’Estoile évoque à ce sujet la « rencontre » de Dormans (10 octobre 1575), au cours de laquelle est touché au visage Henri Ier de Guise, dit ensuite « le Balafré » : le jeune chef militaire, « en ceste rencontre, par simple soldat à pied qu’il attaqua, fut grievement blessé d’un harquebuzade qui lui emporta une grande partie de la joue et de l’aureille gauche » (L’Estoile, 1621/1996-2006, t. I, p. 205). De cette victoire de l’armée royale sur les reitres allemands, L’Estoile estime que « le bruit » est « plus grand que l’effet », parce que peu de soldats ont trouvé la mort – « pas cinquante hommes de part et d’autre » –, et parce que Thoré, à la tête des troupes protestantes, est parvenu à poursuivre son chemin. La victoire se renverse encore davantage en échec pour le camp catholique quand est considérée la dommageable blessure du jeune prince, causée par un simple quidam. En arrière-plan, le scandale, notamment dénoncé par Monluc (1582/1964, p. 34), est celui des ravages provoqués par les armes à feu, qui octroient une grande capacité de nuisance à un « poltron », même lors d’une simple altercation.

Les rencontres sont encore le cadre de renversements inattendus et dangereux du rapport de force. Au livre IV des Grandes Annales, Belleforest raconte la croisade d’Aragon menée par Philippe III le Hardi. En 1285, le roi d’Aragon Pierre III conduit une embuscade pour se saisir d’un convoi de ravitaillement de l’armée française, qui tient Gérone assiégée. L’embuscade est elle-même attaquée par le connétable français Raoul II de Clermont-Nesle, par Jean de Harcourt et Guy de Lusignan, dont les troupes fort nombreuses, contrairement aux attentes du souverain aragonais, obligent ce dernier, grièvement blessé, à prendre la fuite. Plusieurs versions de l’événement s’affrontent selon Belleforest :

L’historien de Sicile dict que cecy fut en bataille ouverte, en laquelle les deux Rois combatirent, et les Historiens d’Espaigne et d’Aragon, ne font mention aucune, ny de la bataille, ny de la blessure de ce Roy, seulement dient-ils qu’il mourut en son lict à Valence : mais et nos Historiens, et les Anglois, et le Sicilien, et le Napolitain, et tous les autres sont arrestez en cecy qu’il fut blecé en ce rencontre. (Belleforest, 1579, t. I, IV, f. 740 v°)

Les manchettes permettent d’identifier l’historien sicilien Tommaso Fazello ainsi que Pandolfo Collenuccio, auteur de l’Histoire du royaume de Naples (trad. 1595). Mais tandis que le premier fait de l’embuscade une véritable bataille (De Rebus Siculis Decades Duae, 1558, IX, 1), Belleforest choisit de désigner l’épisode comme une rencontre, suivant en cela plusieurs sources concordantes. Le terme paraît d’ailleurs mieux convenir à la structure même du récit, qui repose sur un renversement de situation plaisant pour le lectorat français, sur le modèle du « tel est surpris qui croyait surprendre ». L’interprétation finale de l’historien souligne le caractère périlleux d’une entreprise qu’un roi n’aurait pas dû assumer en personne :

ainsi [Pierre III] feit un pas de clerc, et un tour d’un jeune homme, bien qu’il fut aagé de cinquante et cinq ans : et ne sçache guerrier qui voulut loüer son faict, et entreprise qu’un grand Roy se mit luy mesme en embusche, pour surprendre les vivres de ses adversaires, estant ces choses hazardeuses, et l’heur des rencontres fort journalier. (Belleforest, 1579, t. I, IV, f. 740 v°)

La conduite royale est blâmée, parce que la tentative de suivi du convoi ne constitue pas une belle occasion de mourir. Elle manifeste une méconnaissance des risques encourus et de la réversibilité des situations, que souligne l’adjectif « journalier »20 (sujet à changement).

3.3. Surprise et ruse

À la source des deux phénomènes que l’on vient d’établir, se trouve l’effet de surprise, caractéristique déjà essentielle dans le récit de la « Journée des Éperons » proposé par Gilles :

Lesdictz Anglois assiegerent Therouenne, et jouerent un merveilleux tour aux Francoys : car un jour une petite compaignie d’Anglois se meit aux champs, apres lesquelz se meirent aucuns Françoys, et en trop petit nombre : toutesfois il en y avoit des plus hardys de l’armee du roy de France : et voyans que par fuyte avoyent perdu de veue les Anglois, se meirent au repos sur les champs, où incontinent furent surprins et trouvez en desordre par les Anglois, lesquelz prindent plusieurs Françoys prisonniers : sçavoir est ceulx qui ne se tournerent en fuyte, et le surplus se saulva à la fuyte, dont ilz furent desprisez : et pour ceste fuyte on appela ceste rencontre la Journee des Esperons. (Gilles, 1562, t. II, f. 137 r°)

Les Français, y compris les plus braves de l’armée, sont pris au dépourvu et la retraite tourne à la déroute dégradante pour la majeure partie des troupes (« desprisez » signifiant méprisés, blâmés). La confrontation n’a en revanche rien d’inopiné pour les Anglais : elle est présentée comme un « tour » adroit, qui a consisté à attirer les Français « en trop petit nombre » en terrain découvert et à les attaquer « au repos » et « en desordre », une fois échappés ceux qu’ils étaient venus attaquer. La rencontre est bien « pourchas », mais ceux qui croyaient mener la poursuite découvrent être les proies. Piège jouant de la simulation et de la surprise, elle est donc ruse de guerre, manifestation d’habileté de la part des Anglais (Holeindre, 2017, p. 19 ; Pretalli, 2021, p. 141-144). La troupe française, elle, n’est pas exempte de responsabilité : « cette dernière, en pourchassant l’ennemi, a créé les conditions de sa propre débâcle » (Guerrier, 2016, p. 32).

Le fait d’attaquer « par rencontre » peut ainsi être un choix tactique, une modalité d’affrontement moins dangereuse que la bataille et parfois fort efficace pour l’emporter. Du Haillan, dans son récit du règne de Charlemagne, raconte la campagne de ce dernier en Al-Andalus, et notamment la prise de Pampelune (778). Face à la menace d’un siège, les dirigeants musulmans de la ville réclament un délai pour se préparer, que le roi des Francs leur refuse. Le récit de l’épisode est assorti du constat suivant :

Les Sarrasins avoient une coutume devant qu’ils eussent cognoissance des François, de remettre toute leur fortune sur l’evenement d’une bataille, toutefois ne s’en estants jamais gueres bien trouvez, il ne faisoient plus que dilayer, et suyvans la coustume des vieils Espaignols, ils ne combattoient en ce temps que par quelques rencontres, sans ainsi tout d’un coup se hazarder. Si est-ce que s’ils trouvoient leur advantage, ils le poursuyvoient fort diligemment, usans es choses douteuses de conseil, et temporisans es dangereuses. (Du Haillan, 1576, III, p. 160)

Du Haillan emprunte ce passage, mot pour mot à partir de « toute leur fortune », à la traduction par Jean Regnart de l’ouvrage de Paul-Émile, De rebus gestis Francorum libri VII (1520, f. LV r°), parue sous le titre des Cinq premiers livres de l’histoire française (1556, II, 23, p. 109-110)21. Ce dernier évoque un changement de tactique, répondant à une quête d’efficacité face à un nouvel ennemi et relevant d’un principe de modération et d’économie : il s’agit de s’engager d’abord peu, afin d’évaluer le rapport de force (Lamy, 2021, p. 108). La rencontre est présentée comme le cœur d’un art de combattre et de gouverner reposant sur l’attention au conseil ainsi que sur une capacité à temporiser, qualités louées par les humanistes ayant eux-mêmes combattu comme Guillaume Du Bellay (Piettre, 2017). Cette adaptation à la puissance française, manifestation de prudence, est également mentionnée par Belleforest, en des termes neutres dans Les Grandes Annales (Belleforest, 1579, t. I, f. 163 v°), en des termes péjoratifs dans L’Histoire des neuf roys Charles de France, à la tonalité encomiastique plus marquée (Lestringant, 2008) : les adversaires du royaume franc y deviennent de « cauteleux ennemy » tentant par tous les moyens d’éviter « la ruine qui leur estoit imminente » (Belleforest, 1568, p. 12). A priori sage, la manœuvre devient pratique condamnable, au gré d’une réversibilité du discours sur les ruses guerrières, selon qu’elles sont perçues comme des déloyautés ou comme des manifestations de l’intelligence (Holeindre, 2017, p. 112 ; Lamy, 2021, p. 118).

Dans la lignée des conseils fournis par Végèce (De re militari, III, 9), le refus de la bataille est d’ailleurs valorisé par Belleforest comme une marque de sagesse dans le même ouvrage, lorsque sont tour à tour évoqués le siège d’Amiens (1597) et l’attitude de l’empereur Maximilien II face aux Ottomans, qui refuse de mettre « une belle armée en hazard » et « la Chrestienté presque toute en desordre » en cas de défaite (Belleforest, 1568, p. 542). À une échelle moindre, l’affrontement « par rencontre » est célébré à travers le modèle du condottiere qu’incarne Bartholomeo d’Alviano, dont Brantôme brosse le portrait : après avoir été capturé et avoir failli mourir noyé, l’Italien « se remet en campaigne et mieux que jamais guerroye et fattigue ses ennemis par rencontres, combatz, courses et surprises et mesmes en une où il cuyda attraper ce grand marquis de Pescayre22, par une grande et longue cavalcade qu’il fit un jour » (Brantôme, 1869, t. II, p. 195). L’efficacité redoutable du condottiere est fruit d’une mobilité apparemment incessante, qui le rend habile à poursuivre ses ennemis et lui-même insaisissable. Acteur de la poursuite, il paraît mettre à profit le caractère incertain de la rencontre sans le subir.

La notion de rencontre, catégorie intermédiaire et relativement souple, sans équivalent précis en grec, en latin et en italien, mais aux caractéristiques saillantes assez stables dans les récits historiographiques de la seconde moitié du xvie siècle, se dessine comme un « lieu » pour représenter et penser la guerre en français. À l’instar de toute forme de « petite guerre », la rencontre ne se distingue pas tant de la bataille « par le nombre ou la qualité des hommes engagés que par des objectifs réduits et ses pratiques indirectes fondées sur la surprise, la ruse et les stratagèmes » (Deruelle, 2017, p. 14). Les emplois du terme reflètent la relativité des catégories historiques et la réversibilité des discours, de l’éloge au blâme, en fonction des contextes et des démonstrations visées ; la rencontre est saluée lorsqu’elle est le cadre d’une preuve de courage, évaluée avec plus de circonspection lorsqu’elle est fruit d’un calcul. Ses représentations montrent, enfin, comment un mode d’affrontement, temps d’exposition à la violence, au danger et à l’incertitude, peut garantir la régulation de ces menaces : la rencontre est exposition au hasard quand elle est confrontation imprévue mais preuve d’une maîtrise du risque quand elle découle du choix stratégique d’un recours au combat fragmenté.

Bibliographie

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Notes

1 Voir Benoît de Sainte-Maure, Chroniques des Ducs de Normandie (ca. 1175) : « sans lui alerent li ouen joindre e rencontrer lors enemis ». Le verbe rencontrer dérive de encontrer, qui lui-même dérive d’encontre, issu du bas latin incontra, adverbe et préposition exprimant l’idée d’opposition.

2 On trouve un paradoxe similaire dans le Dictionnaire françois latin de Robert Estienne : « Rencontrer et aller au devant, Occursare » et « rencontre quelqu’ung qu’on ne cerchoit pas, Incidere in aliquem » (Estienne, 1539, p. 426). L’ambivalence demeure dans la langue actuelle selon le TLFi, dans lequel la rencontre est définie, au sens militaire, comme un « choc, fortuit ou non, entre des troupes ».

3 B. Deruelle signale Le Parfaict capitaine (1636) du duc de Rohan et De la Charge des gouverneurs des places (1639) d’Antoine de Ville. Il s’intéresse, dans son article, au Galien Rethoré (1500), au Jouvencel (1493) de Jean de Bueil et aux Instructions sur le fait de la guerre (1548) de Raymond de Fourquevaux.

4 Outre l’édition de Denis Sauvage citée ensuite, Belleforest donne un abrégé de ce long récit sous le titre de Recueil diligent et profitable auquel sont contenuz les choses plus notables à remarquer de toute l’Histoire de Jean Froissart (Paris, 1572). Dans Les Essais, Montaigne cite à plusieurs reprises le « bon Froissart » (II, 10).

5 Le qualificatif « Scythes », qui renvoie fréquemment, à la Renaissance, aux habitants de l’Empire ottoman, désigne ici des guerriers issus de « Sarmatie », territoire qui couvre, dans L’Histoire de la decadence de l’empire grec, la Russie et l’Ukraine actuelles (Chalcondyle/Vigenère, 1577, III, 7, p. 172-173). Le propre des « Scythes », nomades, est de « courir, brigander et envahir le pays d’autruy » (III, 8, p. 178).

6 Comme Belleforest l’explique, le combat se déroule en fait en deux charges, entrecoupées d’un temps de répit.

7 Voir par exemple César, Les Commentaires sur la guerre des Gaules, I, 44 : « uno proelio » devient « une seule rencontre » chez Vigenère (César/Vigenère, 1576, p. 47) ; de même, voir Chalcondyle/Vigenère, 1577, I, 4 p. 19 et II, 9, p. 117, en regard de Chalcondyle, 1843, p. 17 et 90. Le terme proelio n’est pas toujours traduit par rencontre, mais par des substantifs comme guerre ou escarmouche, ou par des verbes comme combattre.

8 Voir Chalcondyle/Vigenère, 1577, I, 13, p. 71, en regard de Chalcondyle, 1843, p. 55. Voir également Desarbres, 2018.

9 Voir Plutarque/Amyot, 1575, « Les Dicts notables des anciens rois, princes, et capitaines », « Apophtegme de Publius Licinius », f. 203 r° C ; « Apophtegme de César », f. 208 v° E ; Plutarque/Amyot, 1565, « Vie de Thésée », XXV, 4, f. 9 v° E. Je remercie très chaleureusement Paul-Victor Desarbres et Xavier Lafontaine pour leurs précieuses lumières sur les textes grecs.

10 Voir Machiavel/Charrier, 1546, III, 7, f. 42 r° ; f. 43 v° ; f. 44 r° ; III, 8, f. 47 v°, en regard de Machiavel, 1541, III, f. 48 r° ; f. 50 v° ; f. 55 r°.

11 Voir Rocca/La Popelinière, 1571, I, 8, f. 34 v° ; I, 9, f. 40 v° ; IV, 8, f. 152 v°, en regard de Rocca, 1566, f. 47 v° ; f. 55 v° ; f. 255 v°.

12 Voir Guichardin/Chomedey, 1568, II, f. 37 v° ; III, f. 51 v° ; III, f. 64 v° ; V, f. 108 r° ; X, f. 205 r° ; XIII, f. 269 v° ; XV, f. 320 v° ; XVII, f. 363 r°, en regard de Guichardin, 1567, vol. 1, p. 87 ; p. 120 ; p. 151 ; p. 257 ; p. 493 ; p. 647 ; p. 768 ; vol. 2, p. 51.

13 Voir les deux premières occurrences citées supra.

14 Voir Guichardin/Chomedey, 1568, X, f. 205 r° (Brescia) ; XV, f. 320 r° (Pavie), en regard de Guichardin, 1567, vol. 1, p. 493 ; p. 768.

15 Voir Guichardin/Chomedey, 1568, I, f. 18 v° ; II, f. 38 r°, en regard de Guichardin, 1567, vol. 1, p. 41 ; p. 88. Dans l’Encyclopédie Treccani, l’emploi de riscontro en un sens militaire, signalé comme « toscan et littéraire », est associé uniquement à Guichardin ; le second exemple fourni correspond à notre première occurrence.

16 Selon le FEW, escarmouche, qui se répand en français autour de 1360-1370, pourrait venir de l’italien scaramuccia ou bien de l’ancien français escremie (lutte, combat).

17  La rencontre de Saint-Clair devance de quelques jours l’importante bataille de Moncontour.

18  Sur Montaigne et l’écriture de l’histoire, voir notamment Dubois, 1991.

19 C’est-à-dire Louis de Nassau et Christofle de Bavière, fil de l’électeur palatin.

20 L’expression est empruntée par Belleforest à la traduction par Gentian Hervet de la Cité de Dieu d’Augustin (1570, III, p. 80). Il s’agit d’une des premières attestations de l’adjectif en ce sens (TLFi).

21 « Et Sarraceni initio soliti fortunae unius praelii summam rerum committere : quando id parum prospere cesserat : morem ueteris Hispaniae secuti perpetuis bellis leuia praelia : quae universam rem iuuarent potius quem decernerent faciebant : secundis haud segniter utebantur : dubiis experiendo : adversis cunctando tempus extrahebant. » Il faudrait encore trouver la source de Paul-Émile, qui n’est a priori pas les annales franques, peu loquaces au sujet de Pampelune (Aebischer, 1957, note 30, p. 34-35).

22 Fernando de Ávalos, marquis de Pescara, l’un des principaux capitaines de Charles Quint.

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Référence électronique

Alicia Viaud, « Rencontre militaire : hasard de l’affrontement dans l’historiographie française de la seconde moitié du XVIe siècle », Atlantide [En ligne], 14 | 2023, mis en ligne le 01 mai 2023, consulté le 09 octobre 2025. URL : https://atlantide.pergola-publications.fr/index.php?id=757

Auteur

Alicia Viaud

Professeure adjointe au département des littératures de langue française de l’université de Montréal, membre du GRHS et chercheuse associée au laboratoire FIRL (Paris 3), les travaux d’Alicia Viaud portent principalement sur l’écriture de l’histoire dans la seconde moitié du XVIe siècle. Elle a, à ce sujet, publié À hauteur humaine. La fortune dans l’écriture de l’histoire (1560-1600) (Droz, 2021).

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