Traduction et sédition. Circulations transnationales clandestines des œuvres en contexte non démocratique

DOI : 10.56078/atlantide.1000

Résumés

À partir d’une enquête de sociologie historique sur les transferts littéraires en provenance d’Europe de l’Est vers la France pendant la Guerre froide et notamment de deux études de cas, l’article montre que la traduction est un vecteur des circulations transnationales qui contournent, subvertissent ou contestent le contrôle et la censure de l’imprimé exercés sous des régimes non démocratiques. La traduction exige et apporte, en l’occurrence, des ressources spécifiques. Supposant des pratiques, des compétences, des savoir-faire, voire des stratagèmes appropriés, elle implique l’intervention d’intermédiaires divers, parmi lesquels des traducteurs et des éditeurs, qui apprennent à contourner des difficultés d’ordre politique, juridique et matériel. La traduction contribue en retour à la reconnaissance littéraire internationale des auteurs bénéficiant de la circulation non autorisée de leurs œuvres à l’étranger ainsi qu’à la légitimation des milieux intellectuels marginalisés ou proches de l’opposition à ces régimes. Les contextes circulatoires et les situations d’édition analysés permettent, enfin, de questionner des catégories analytiques utilisées dans des situations routinières.

The article shows that the translation is an important means of transnational circulation that circumvented and challenged censorship and control on printed material exercised by undemocratic regimes. It is based on a sociological and historical research on the literary transfers from Eastern Europe to France during the Cold War and in particular on two case-studies. In such a context, the translation requires and provides specific resources. It involves practices, competences, know-how, and even appropriate stratagems, as well as different intermediaries, such as translators and publishers, who get acquainted with the manners in which they can curb or prevent political, legal and practical obstacles. Conversely, the translation contributes to the international literary recognition of authors whose works are disseminated abroad and helps legitimating intellectual underground milieus or which are close to the political opposition. The specific contexts in which texts are disseminated and published allow questioning analytical categories usually used.

Plan

Notes de l’auteur

Cette contribution est issue d’une conférence présentée dans le cadre du séminaire Politique et traduction, organisé par Christine Lombez à l’Université de Nantes, le 10 mars 2014. Elle s’appuie sur l’enquête présentée dans Ioana Popa, Traduire sous contraintes. Littérature et communisme (1947-1989), Paris, CNRS Éditions, 2010.

Texte intégral

Pendant des périodes de persécution et de contrôle politique accru de l’écrit, l’édition clandestine et la diffusion par-delà les frontières des textes frappés d’interdit comptent parmi les formes d’insoumission et de résistance spécifiques des intellectuels1. La traduction joue un rôle important dans ces circulations transnationales qui contournent, subvertissent ou contestent ouvertement les pouvoirs qui exercent ce contrôle, en requérant et en apportant à la fois des ressources spécifiques. L’instauration des régimes communistes dans les pays d’Europe de l’Est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale offre un des contextes historiques permettant de l’observer, en réaction aux transformations que subissent les espaces de production culturelle (étatisation, centralisation, contrôle idéologique, censure à la fois préventive et répressive). La codification stricte du régime interne de publication autorisée des textes dans ces pays s’accompagne d’une réglementation de leur circulation internationale à travers son autorisation par l’État, nécessaire pour toute traduction à l’étranger et a fortiori, dans un pays occidental. Bien que rudimentaire et très limitée au départ, une circulation non autorisée des textes, à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des pays communistes, est toutefois possible. La traduction en Occident des oeuvres prohibées dans ces pays permet, en outre, aux écrivains est-européens d’envisager non seulement un mode de survie littéraire, mais aussi une forme d’action subversive : elle consiste à contourner le monopole que les éditions d’État détiennent sur la publication de leurs œuvres par leur envoi à l’étranger. Mis en place afin de contourner les interdictions de publication et les obstacles érigés par la censure, les circuits clandestins d’édition et de traduction ne diffusent pas forcément une littérature engagée contre le communisme, mais aussi des œuvres qui n’aspirent à être « que » de la littérature. Ils constituent cependant, par leur existence proprement dite, une forme de contestation d’un pouvoir non démocratique, au nom duquel cette censure s’exerce. La circulation de l’écrit qu’ils rendent possible à une échelle nationale et transnationale est d’ailleurs interprétée comme séditieuse et est punie par les autorités.

Toute une gamme de compétences, de savoir-faire, voire de stratagèmes appropriés est dès lors déployée afin de jouer sur les limites de la légalité au regard du droit des pays socialistes et de protéger les auteurs des risques encourus. Pour être efficace, la politique par la traduction ainsi envisagée par des écrivains est-européens doit cependant converger avec les politiques de traduction des éditeurs occidentaux, et plus généralement, avec des logiques de réception favorables à la réception de leurs oeuvres. Cette rencontre peut cependant s’accompagner de malentendus, connaître des ratés, soulever en tout cas de nombreuses difficultés d’ordre pratique, politique et juridique.

J’illustrerai brièvement ici certains de ces aspects à partir d’une enquête de sociologie historique sur les transferts littéraires en provenance de plusieurs pays d’Europe de l’Est vers la France entre 1947 et 1989. Elle m’a permis de formaliser plusieurs circuits de traduction, qui renvoient à des modalités aussi bien autorisées que non autorisées de circulation internationale des œuvres produites dans un contexte non démocratique. Je m’appuierai notamment sur deux études de cas révélatrices du second type de dynamique, et qui sont inscrites dans des configurations historiques et nationales différentes. Succinctement présentées ici, elles ont surtout une visée heuristique, permettant d’interroger le rôle de la traduction dans un contexte de domination politique2 ainsi que les marges de manœuvre pouvant être envisagées à travers elle. Ces cas conduisent plus particulièrement à montrer comment la complémentarité entre circuits clandestins internes et circuits de transfert international, ainsi que la progression quantitative des traductions non autorisées reposent sur l’articulation imparfaite, instable, mais progressivement réussie entre plusieurs paramètres : espaces (est-européens et occidentaux) de circulation des textes, instances diverses de publication (éditeur clandestin est-européen, maison d’édition en exil, éditeur occidental), enfin, supports matériels et formes éditoriales successives d’une même œuvre (samizdat3, livre dans la langue d’origine édité en exil, livre traduit). Enfin, les deux cas ciblés ici témoignent de l’intérêt qu’il y a à retracer non seulement les trajectoires géographique et éditoriale de l’œuvre traduite, mais aussi sa trajectoire « textuelle » — c’est-à-dire la succession éventuelle de différentes versions d’un même texte, adossées sciemment, à l’insu ou malgré la volonté de son auteur à des supports successifs et atteignant des publics divers.

1.  Un « ordre » perturbé : une traduction qui devient séditieuse

Jusqu’à la déstalinisation au moins, les marges de manœuvre et les ressources dont disposent les acteurs éventuels d’un transfert littéraire non autorisé sont fortement restreintes, à défaut d’infrastructures éditoriales clandestines dans les pays socialistes ou des possibilités de transmettre à l’étranger des textes dont la publication n’est pas autorisée dans ces pays. Ce sont seulement les œuvres d’écrivains d’Europe de l’Est physiquement présents en Occident en raison de leur exil qui, traduites directement à partir d’un manuscrit, alimentent le transfert non autorisé. Le premier à envoyer son œuvre à un éditeur occidental aux fins de traduction alors qu’il continuait à vivre dans un pays socialiste est l’écrivain soviétique Boris Pasternak. La traduction du Docteur Jivago4 en 1957, d’abord en italien, puis dans de nombreuses autres langues étrangères, est le résultat d’une situation inédite au regard à la fois des modalités de transfert d’un manuscrit et de la consécration internationale de son auteur. L’évolution non linéaire et contradictoire de la déstalinisation conduit l’écrivain à associer, bien malgré lui, des pratiques licites et non autorisées et à mettre en œuvre, in fine, un nouveau circuit de traduction. Dans un premier temps, le Docteur Jivago, est destiné à paraître officiellement en URSS. Cette perspective semble confortée par la réédition en cours des œuvres de Pasternak. Intellectuel de formation pré-révolutionnaire, survivant de la grande génération poétique de Maïakovski, Tsvetaieva ou Essenine, ce dernier avait rallié la Révolution mais subi ensuite une très longue période d’interdiction de publication, qui avait donc pris fin grâce au dégel. C’est dans l’intervalle d’attente de la réponse des éditions d’État auxquelles le manuscrit du Docteur Jivago avait été soumis que l’écrivain en fournit un exemplaire à un agent littéraire mandaté par un éditeur italien, Feltrinelli. A l’origine, il n’y a ni hasard ni subversion dans cette rencontre5 : c’est l’œuvre d’un écrivain du dégel qu’un jeune éditeur certes occidental, mais lui-même membre du Parti communiste, tient absolument à éditer. Pasternak remet cependant son manuscrit sans demander préalablement l’accord des instances étatiques censées servir d’intermédiaires d’une éventuelle traduction, une certaine ambivalence semblant caractériser ses intentions. Le processus ainsi enclenché finira, en tout cas, par lui échapper en partie : cet envoi, censé au départ ne pas précéder l’édition soviétique, aboutit à la publication du roman directement en traduction, qui en devient ainsi l’édition originale. Interprété par les autorités soviétiques comme un geste hostile en pleine Guerre froide, son acte prend alors les dimensions d’une affaire d’État. Pasternak se prévaut du fait que la mise en chantier de cette publication à l’étranger a été faite alors qu’elle était encore en préparation à Moscou. Il argue également que son manuscrit a certes franchi la frontière vers l’Occident, sans atterrir pour autant dans le camp de la « réaction », puisqu’il y a été reçu par un éditeur (encore) communiste6. Le Comité Central du PCUS décide néanmoins du refus de la publication en URSS du Docteur Jivago, l’étiquetant comme hostile à l’idéologie marxiste et y voyant un » livre antisoviétique »7, calomniant la révolution de 1917. Alors qu’une publication officielle du Docteur Jivago aurait pu empêcher que sa traduction n’en devienne l’édition originale, ce refus fait basculer le statut du manuscrit et la stratégie de son auteur dans l’espace non autorisé du transfert littéraire. Les autorités soviétiques assignent donc à Pasternak une position déviante, l’amenant ainsi à inventer un nouveau circuit de traduction pour continuer à exister en tant qu’auteur. Elles font pression sur lui pour qu’il obtienne la restitution de son manuscrit, ce qui le conduit à devoir trouver en permanence de nouvelles solutions pratiques pour faire aboutir son projet de publication.

L’écrivain fait semblant d’obéir aux injonctions et se prévaut auprès de son éditeur italien du besoin qu’il éprouve d’opérer des remaniements de son manuscrit, qu’il désigne comme une version provisoire. Il est ainsi amené à se prévaloir du droit de l’auteur à disposer librement de son œuvre, alors qu’il écrit ses lettres sous contrainte. Son éditeur ne se soumet pas pour autant à sa demande car, conformément à un « code » dont ils avaient convenu, il ne doit se fier qu’aux lettres écrites en français ou allemand, et non pas en russe, langue dans laquelle étaient écrites les premières. On voit ainsi comment tout univers clandestin nécessite un ensemble de pratiques et de codes sans lesquels le transfert littéraire échoue. Remplissant ici une fonction de « contrebande », le recours alterné à trois langues s’avère décisif dans la communication entre l’auteur et son éditeur. La bonne connaissance des règles du jeu de l’univers communiste qu’ont en commun Pasternak et Feltrinelli leur confère, en outre, à tous les deux un sens pratique qui, une fois que le projet d’édition bascule, contre leur gré, dans l’espace non autorisé de publication, leur permet malgré tout de gérer une situation inédite. L’éditeur maîtrise donc lui aussi la « langue » qu’il faut : il fait ainsi officiellement savoir à Pasternak qu’au nom de l’accord déjà conclu et prévoyant la cession des droits de publication et de traduction du Docteur Jivago, il ne respectera pas sa « volonté », façon implicite d’informer également les autorités soviétiques du caractère inéluctable de la traduction italienne. Sa stratégie consiste dès lors à déresponsabiliser l’auteur et de cette manière, à le protéger. Elle sera également adoptée par les éditeurs des traductions française (Gallimard) et anglaise, censées lui succéder. Soumis à des pressions pour abandonner à leur tour ce projet, ils affirment être sous contrat avec Feltrinelli : autrement dit, ils ne sont juridiquement liés ni à l’organisme chargé de la diffusion des ouvrages soviétiques à l’étranger, ni à Pasternak. Les éditeurs occidentaux dénient ainsi, en apparence, le droit de l’auteur pour, en réalité, mieux le protéger et finissent par publier les traductions du roman. Elles alimentent une controverse qui se déploie désormais à l’échelle d’un espace public international et qui atteindra sa plus grande intensité lors de la consécration de Pasternak par le prix Nobel de littérature en 1958, que celui-ci sera contraint de refuser toujours sous la pression des autorités soviétiques.

Cette situation d’édition particulière implique, par ailleurs, l’intervention d’intermédiaires divers, parmi lesquels des traducteurs, contribuant à accroître le rôle et les attributions de certains d’entre eux. Elle entraîne aussi des circulations multiples, voire « contradictoires », des exemplaires de l’œuvre. Mis à part le manuscrit du Docteur Jivago confié à Feltrinelli et un autre, envoyé en Pologne, Pasternak transmet, en effet, deux autres manuscrits à destination de la France (dont un sera finalement acheminé vers l’Angleterre). Les intermédiaires en sont deux de ses futures traductrices françaises, des universitaires venues à Moscou grâce à des accords d’échange académique8. Cette multiplication des supports des traductions potentielles, ainsi que des médiateurs et des lieux de réception, témoigne d’un projet de circulation internationale du roman que l’écrivain élabore au fur et à mesure, selon les opportunités dont il dispose au gré des circonstances. Mais elle entraîne aussi le risque d’une multiplication des versions textuelles, en raison des corrections stylistiques que celui-ci opère au fur et à mesure. Cela suscite des incertitudes sur des points précis d’ordre formel, amenant à se demander laquelle de ces versions est l’original russe. Cette situation relève, en l’occurrence, non pas d’une sorte d’indécision artistique de l’écrivain mais, avant tout, des difficultés de communication et de transmission des textes à l’étranger auxquelles il se heurte. Presque accidentelle ici, la multiplication des versions pourra en revanche devenir plus tard, on le verra, une stratégie de publication utilisée par d’autres écrivains.

Elle devient en l’occurrence une source de malentendus, qui portent également sur le rôle que différents intermédiaires sont censés jouer. Ces malentendus conduisent notamment à un désaccord entre l’éditeur italien et l’une des traductrices françaises du roman, dont témoignent les correspondances croisées des protagonistes. Cette dernière, Jacqueline de Proyart, est désignée par Pasternak comme son « fondé de pouvoir » en Occident. De manière tâtonnante, confuse, voire ambiguë, l’écrivain cherche ainsi à « inventer » à travers celle-ci « un quasi-moi-même hors de nos frontières » qui le remplace « par son autorité, ses avis, son nom, sa signature9 », ce qui est aussi pour lui une façon de se protéger en se mettant « hors-jeu ». Cette volonté de mise en retrait de l’écrivain montre à quel point deviennent pesantes pour lui la multiplication des contraintes et la collusion des logiques différentes entre lesquelles il doit désormais se mouvoir — politiques, mais aussi, par le biais des interlocuteurs occidentaux, économiques et juridiques. Cependant, le jeu ne peut, en l’occurrence, être mené à trois — écrivain, éditeur, traductrice : fait d’implicite, d’« improvisation », reposant sur la confiance mutuelle, il nécessite une entente parfaite entre les partenaires et l’orchestration de leurs choix et de leurs pratiques. Or, les désaccords entre les deux intermédiaires tiennent ici autant à des dispositions sociales dissonantes qu’à des visions éditoriales du Docteur Jivago particulières et entraînant toute une série de méprises : la traductrice rabat la position et l’intérêt de Feltrinelli sur ceux qui sont spécifiques aux pôles militant ou purement commercial de l’édition, estimant que ce dernier met en péril l’écrivain en raison de son appartenance au PCI. Pasternak ignore à quel point il est indispensable, pour son éditeur, de garder un rapport direct avec son auteur. Feltrinelli mésestime le besoin de l’écrivain d’inventer un alter ego à même d’agir à sa place, en considérant la traductrice comme une « intruse » dans la relation qu’il a déjà nouée avec son auteur et qui sème par ailleurs le trouble parmi les autres éditeurs étrangers. Compte tenu des circonstances exceptionnelles de la circulation des textes, il trouve par ailleurs décalée l’exigence de rigueur linguistique que celle-ci, une universitaire, entend imposer à leur édition.

C’est la publication d’une édition en russe du Docteur Jivago, désormais envisageable uniquement à l’étranger, qui exacerbe ces tensions. Elle révèle à son tour à quel point le circuit de traduction emprunté a pu bouleverser les pratiques et la logique habituelles du transfert littéraire. Malentendus, incertitudes à propos de la manière dont s’applique le droit d’édition à propos d’une publication faite certes dans la langue d’origine de l’œuvre, mais qui n’est plus son édition originale, multiplication fortuite des versions, concurrence entre intermédiaires (mandatés ou auto-désignés) conduiront à la publication de plusieurs éditions différentes en russe du Docteur Jivago : une, préparée aux États-Unis par des presses universitaires, deux chez Feltrinelli, enfin, une qui est « trafiquée » et éditée aux Pays-Bas, avec l’intervention supposée d’une organisation exilée russe et de la CIA10, pour être envoyée et diffusée clandestinement en URSS. On peut se demander si celle-ci est une contrefaçon destinée à précéder l’édition en russe que Feltrinelli allait lui-même publier, illustrant ainsi la première affaire de piraterie littéraire d’un texte écrit par un écrivain des pays de l’Est, ou s’il s’agit plutôt d’une édition censée s’intégrer aux dispositifs d’envois de livres vers ces pays, mis en place par des instances anticommunistes occidentales11. Elle deviendra en tout cas l’une des toutes premières à alimenter les éditions samizdat, alors naissantes. Plutôt que de trancher entre ces deux cas de figure, ce qui mérite d’être souligné ici est la nouveauté de la situation d’édition créée par une traduction devenue séditieuse. Elle témoigne de l’ampleur des enjeux politiques mais aussi économiques que peut atteindre la traduction des textes provenant d’Europe de l’Est pendant la Guerre froide, ainsi que des circulations Est/Ouest, désormais géographiquement croisées, des œuvres.

2.  Un « désordre » prolifique : traductions de la contestation

Ces circulations s’intensifient dans les deux sens géographiques à partir notamment du tournant des années 1970. La reconfiguration et l’essor de l’espace du transfert non autorisé tiennent désormais à la traduction de textes d’abord édités illicitement à l’intérieur des pays communistes, sous la forme des samizdats, ou encore, en exil, par des maisons d’édition dont la capacité matérielle de diffusion des textes interdits, ainsi que le pouvoir de consécration, ne cessent de s’accroître. S’articulant aux circuits du transfert littéraire international, ils permettent la progression quantitative et la diffusion géographique élargie du discours traduit non autorisé12. Ces évolutions ne sont ni simultanées ni généralisées à l’échelle de tous les pays socialistes.

Les modalités originales de fabrication des samizdats et, surtout, de leur multiplication et diffusion influent sur l’extension de leur circulation par-delà les frontières. Alors que l’éditeur clandestin met en circulation, en général, un nombre très limité d’exemplaires, chaque lecteur qui en en possède un, peut le recopier, devenant à son tour producteur d’un nouvel exemplaire et contribuer ainsi à la diffusion du texte « primitif »13 (c’est-à-dire le premier manuscrit lancé en samizdat). La propagation du texte prohibé dépend donc de l’intérêt qu’il suscite auprès de ses lecteurs et de leur capacité à assumer les risques d’une activité illicite. Dans l’édition des samizdats, il n’y a pas de contrefaçon, car non seulement l’éditeur clandestin ne dispose d’aucun droit exclusif sur le texte qu’il est le premier à diffuser, mais il perd tout contrôle de sa reproduction et de sa multiplication. La circulation par « capillarité »14 du livre prohibé est dès lors forcément irrégulière, imprévisible et impossible à retracer avec précision. C’est toutefois grâce à elle que des réseaux de production et de distribution non seulement rendent possible la circulation des samizdats à l’échelle nationale, mais se ramifient aussi à l’étranger. Sa véritable efficacité tient cependant à la complémentarité des supports matériels diffusés par les circuits non autorisés, intérieur et en exil. Elle ne se limite donc pas à un chassé-croisé, permettant aux samizdats d’être envoyés en Occident et, inversement, aux livres et aux revues édités en exil, de pénétrer dans les pays socialistes. La trajectoire géographique d’une œuvre interdite peut ainsi s’accompagner d’un passage par plusieurs supports matériels successifs, dont l’ordre n’est pas figé ni établi d’avance. Prolongée à l’étranger, la circulation des samizdats se fait dans leur langue d’origine, mais désormais sous la forme d’un livre ou d’une revue édités en exil. Avec ou sans ce type d’édition préalable, ces textes peuvent changer non seulement de dispositif matériel, mais subir également une transformation linguistique, devenant une traduction publiée par un éditeur français ou occidental. Ce passage en traduction se fait par exemple directement dans le cas de deux romans de l’écrivain tchèque Jan Trefulka, traduits à partir d’un manuscrit dactylographié. D’autres œuvres connaissent en revanche un cheminement plus complexe. Un recueil de poésies de Jaroslav Seifert paraît d’abord dans une édition samizdat tchèque, ensuite sous la forme d’un livre publié toujours dans la même langue mais en exil (en Allemagne), et enfin, en traduction française (chez Actes Sud).

Pour protéger l’auteur, éditeurs clandestins et acteurs du transfert ont recours à différents stratagèmes. Un consiste par exemple à faire signer par l’auteur les exemplaires reproduits en samizdat d’après son œuvre : en cas d’interception, on peut prétendre qu’il s’agit d’un manuscrit inédit — propriété privée d’un écrivain —, et non d’un texte imprimé qui circule — propriété cette fois d’un auteur qui en a la responsabilité juridique et devient, du fait de cette diffusion publique, « l’objet d’une possible condamnation »15. En outre, sur le livre publié par une maison d’édition en exil, on peut faire figurer la mention « sans autorisation de l’auteur ». On simule ainsi la contrefaçon, en faisant croire qu’il s’agit d’une reproduction frauduleuse du texte, de manière à en déresponsabiliser l’auteur. La complicité de l’éditeur cette fois français est manifeste lorsqu’il cite comme édition originale d’une traduction non pas le samizdat, mais l’édition publiée en exil, censée apparaître comme l’intermédiaire d’une circulation qui n’aurait pas été initiée par l’auteur lui-même, voire se serait faite à son insu (ce qui peut parfois être, en effet, le cas).

Enfin, dans certains cas, la multiplication des supports matériels et des instances de publication s’accompagne non seulement de la transformation linguistique proprement dite de l’oeuvre due à l’opération de traduction, mais d’une variation de son contenu : le texte est lui-même « mouvant », provisoire, instable d’un support à l’autre. Ces transformations peuvent être, nous l’avons vu dans le cas de Pasternak, accidentelles (puisque découlant des aléas qui entourent la capacité de transmettre des textes par-delà le rideau de fer), ou encore involontaires (dues à des coquilles, des fautes de frappe, des suppressions fortuites de certains passages, introduites lors des publications successives par des instances qui travaillent souvent dans des conditions artisanales). Rien de tel dans le cas de l’écrivain tchèque Bohumil Hrabal, l’un des auteurs est-européens les plus traduits en France (et dans d’autres pays) pendant les années 1980. Tirant profit de la redéfinition des possibles circulatoires que l’on vient de retracer, celui-ci transforme le « jeu » sur les variantes d’un même texte en un moyen de subvertir les contraintes qui pèsent sur l’écriture en fonction de l’espace de diffusion et de l’instance de publication. Ainsi, son roman Une trop bruyante solitude a cinq versions16, dont chacune coïncide avec un type de support spécifique : manuscrit, samizdat, édition en exil (publiée en Allemagne), traduction (publiée chez Robert Laffont), auxquels s’ajoute, enfin, une édition officielle. Le cas de Hrabal est, à ce propos, singulier. Déployant une stratégie encore plus complexe que le Polonais Tadeusz Konwicki, par exemple, qui alternait les périodes de publication officielle et en samizdat, Hrabal est l’un des seuls à publier simultanément dans ces deux types de circuit à partir des années 1970.

La trajectoire de Hrabal contribue à faire comprendre pourquoi il parvient à respecter la règle du jeu de chaque espace de publication, autorisé et clandestin : né en 1914 mais ne pouvant faire ses débuts littéraires qu’en 1963, il a été un écrivain interdit et autorisé à plusieurs reprises (et notamment après l’écrasement du Printemps de Prague), donc socialisé aux pratiques des deux espaces de publication. Y contribuent cependant aussi des caractéristiques formelles de son écriture : Hrabal est l’auteur de textes polymorphes, non linéaires, parfois athématiques, avec des phrases très longues, des jeux sur la ponctuation, permettant que des coupes, des ajouts ou des inversions n’en altèrent pas la structure d’ensemble. Cette multiplication des variantes textuelles et, corrélativement, de leurs supports, correspond, enfin, à une progression géographique de l’œuvre et à une diversification des types de public auxquels elle s’adresse.

Cette situation pose cependant des difficultés particulières à la traduction, qui devient, en l’occurrence, une version à part entière. En effet, il est impératif de déterminer quelle version tchèque servira d’« original ». Or, ce n’est pas à partir d’une seule, mais de la confrontation minutieuse des trois variantes considérées par l’éditeur français comme « authentiques », à savoir les versions non autorisées — manuscrite, samizdat et celle qui est publiée en exil — que la traduction française d’Une trop bruyante solitude est faite en l’occurrence. Et c’est l’une des traductrices françaises du roman qui accomplit ce travail, après s’être rendue en Tchécoslovaquie pour demander à Hrabal son accord pour la traduction française et mis au point les détails de leur collaboration17. La directrice de collection de Laffont, Zofia Bobowicz (elle-même d’origine polonaise et ayant une connaissance directe des milieux éditoriaux clandestins de son pays d’origine) et son équipe de traductrices appliquent ainsi la même « solution » que dans le cas de Pasternak, mais cette fois avec succès : c’est la traductrice suisse de Hrabal qui « s’improvise » en agent littéraire et, prétendant que celui-ci n’était pas au courant de ses traductions en Occident, signe tous les contrats à sa place, tout en mettant ses droits d’auteur sur un compte en Suisse18. En raison des conditions illicites dans lesquelles le transfert littéraire s’opère, le traducteur prend des initiatives et des risques et surtout, assume des prérogatives accrues, non seulement pour tout ce qui tient du suivi éditorial proprement dit de la traduction de son œuvre, mais aussi, comme on le voit ici, en faisant des choix textuels à la place de l’écrivain. L’auteur traduit par ces circuits peut ainsi être amené à devoir permettre l’intervention d’une tierce personne dans le contenu de son œuvre, même si cette intervention tient à des raisons bien différentes de celles qui régissent l’immixtion du censeur dans les oeuvres qu’il autorise pour une publication officielle. En dépit d’une forme de circulation des textes garantissant leur intégralité et authenticité, autrement dit, le droit au respect de l’œuvre souvent violé par la censure pour les publications autorisées, la figure de l’auteur comme « maître de son ouvrage » est en partie affaiblie ici en raison des restrictions qui pèsent sur la diffusion et la publicisation de ses écrits et des conséquences qu’elles entraînent y compris sur ses pratiques d’écriture.

Cette situation, comme autrefois celle de Pasternak, témoigne ainsi d’une fragilisation de la position de l’auteur et de la « fonction-auteur »19 dans un contexte de contrainte politique accrue. Mais elle montre également la transformation progressive des possibilités structurelles de transfert littéraire ainsi que la plasticité des contraintes auxquelles ce processus se heurte en fonction de l’origine des textes et du moment de leur circulation. Enfin, la comparaison des deux cas suggère aussi l’importance de l’accumulation des savoir-faire ainsi que d’un sens pratique des acteurs impliqués et d’une fine connaissance des règles du jeu propres aux univers littéraires d’origine des textes (qui restent cependant des compétences distinctives dans l’espace de leur réception). Bien qu’il n’ait donc pas participé à l’élaboration de cette nouvelle version, nécessaire à la traduction en français, Hrabal la reconnaît comme authentique et la fait recopier en vue d’un nouveau samizdat. La traduction française est donc non seulement le moyen permettant d’élargir la circulation d’une œuvre auprès d’un public occidental, mais sert en l’occurrence à la mise au point d’une nouvelle version qui, par sa cohérence stylistique, sera reconnue par l’auteur comme définitive et retrouvera son public initial. En changeant une fois de plus de support, ce texte retournera dans le pays d’origine en vue d’une diffusion clandestine encore plus élargie.

La circulation internationale des oeuvres et, plus particulièrement, leur traduction par-delà le rideau de fer ont pu contribuer — sans être un facteur exclusif — à des dynamiques qui légitiment et renforcent les milieux intellectuels marginalisés ou underground et, a fortiori, ceux qui se sont engagés dans une opposition active contre les régimes en place en Europe de l’Est, fragilisant en même temps les élites culturelles communistes. L’écrit, dans sa matérialité même, et sans doute davantage en raison de sa circulation que par l’engagement de son contenu proprement dit, a été considéré par chacun des deux camps idéologiques s’opposant durant la Guerre froide comme une arme de ce combat. Il a été conçu comme une menace au regard de laquelle il fallait veiller à préserver l’étanchéité du rideau de fer ou, au contraire, comme un moyen d’éroder progressivement cette frontière géopolitique. Les implications politiques de la traduction se trouvent dès lors démultipliées. Elles se déploient non seulement au plan du système culturel récepteur20 mais impactent puissamment aussi l’espace de production des oeuvres traduites. La subversion des frontières tant géographiques que légales de l’univers littéraire d’origine à travers des pratiques telles que celles que l’on vient de décrire soulève, en outre, la question des limites et de la structuration de cet univers. Celle-ci est rendue plus complexe par l’esquisse des pôles éditoriaux aussi bien clandestins que délocalisés à l’étranger, qui entraîne une remise en cause des hiérarchies et des formes de consécration relevant des institutions littéraires nationales. Accéder à un espace intellectuel étranger (ici, occidental) par la traduction de son œuvre peut en effet fournir à un écrivain des modalités de reconnaissance spécifiques, voire concurrentes à celles dont il bénéficie dans son espace intellectuel d’appartenance. Non sans dilemmes, incertitudes ou risques (le cas de Pasternak l’a montré), elle est progressivement envisagée comme un moyen de protection des auteurs face aux formes de persécution qu’ils encourent dans leur pays. Les circuits d’édition et de traduction clandestins posent cependant en eux-mêmes, on l’a vu, des obstacles d’ordre divers. Sans doute plus que jamais, être « auteur » ne se résume pas, en l’occurrence, à la seule position « cardinale »21 du processus d’élaboration de l’œuvre : on voit à quel point la coopération et l’interdépendance d’un ensemble d’acteurs — dont les traducteurs — intervenant dans sa circulation, voire aux marges de sa production et dans la stabilisation de son contenu s’avèrent, en l’occurrence, indispensables. L’observateur voit ainsi ses catégories d’analyse courantes quelque peu troublées, comme d’ailleurs les lignes de partage auxquelles il est habitué dans des contextes routiniers. Il est amené à relativiser ou à nuancer ce qui paraît aller de soi : « auteur », « éditeur », « livre », statut et stabilité du texte, frontières entre licite et clandestin, soumission et dissidence, public et privé, ou encore, frontières linguistiques et géographiques tout court.

Notes

1  Comme l’analyse de différents contextes socio-historiques a pu le montrer, que ce soit à propos de la France pré-révolutionnaire (voir notamment Robert Darnton, Édition et sédition. L’Univers de la littérature clandestine au XVIIIe siècle, Paris, Gallimard, 1991 et The Forbidden Best-Sellers of Pre-Revolutionary France, New York, W. Norton & Co, 1995 ; Roger Chartier, Les origines culturelles de la Révolution française, Paris, Seuil, 1990) ou de la période de l’Occupation (voir Anne Simonin, Les Éditions de Minuit, 1942-1955. Le Devoir d’insoumission, Paris, IMEC, 1994 ; Gisèle Sapiro, La Guerre des écrivains, 1940-1953, Paris, Fayard, 1999, p. 505 et suiv.). À propos des éditions clandestines sous le communisme, voir notamment Ferdinand J. Feldbrugge, Samizdat and Political Dissent in the Soviet Union, Leyden, Sijthoff, 1975 ; Marketa Goetz-Stankiewicz, Good-bye, Samizdat : Twenty Years of Czechoslovak Underground Writing, Enanston, Northwestern University Press, 1992 ; Gordon H. Skilling, Samizdat and an Independent Society in Central and Eastern Europe, Ohio State University Press, Columbus, 1989 ; Ann Komaromi, « The Material Existence of Soviet Samizdat », Slavic Review, n° 63-3, 2004, p. 597-618 ; Jirǐna Šmejkalova, Cold War Books in the « Other » Europe and what came after, Leiden, Boston, Brill, 2011 ; Friederike Kind-Kovacs, Jessie Labov (dir.), Samizdat, Tamizdat, and Beyond : Transnational Media During and After Socialism, New York, Berghahn Books, 2013.

2  Pour une analyse d’autres contextes permettant d’appréhender des enjeux politiques et éthiques de la traduction, voir Maria Tymoczko (dir.), Translation, Resistance, Activism, Amherst, Boston, University of Massachusetts Press, 2010.

3  Ce terme désigne une édition fabriquée de manière artisanale en dehors des circuits de publication étatiques et selon des techniques diverses de reproduction : copies manuscrites, au carbone, dactylographiées, photocopiées, imprimées en offset, etc.

4  Pour une analyse détaillée, ainsi qu’une présentation des sources sur lesquelles elle s’appuie, voir « L’invention d’un circuit de traduction », dans Ioana Popa, Traduire sous contraintes, op. cit., p. 245-310.

5  Elle restera d’ailleurs indirecte : auteur et éditeur ne pourront jamais se rencontrer physiquement.

6  Feltrinelli ne reprendra plus sa carte de membre du PCI à partir de 1958.

7  Rapport du Département de la Culture du Comité Central, antérieur au 31 août 1956, dans Le Dossier de l’Affaire Pasternak. Archives du Comité Central et du Politburo, Gallimard, coll. « Témoins », 1994, p. 14-21.

8 Le Docteur Jivago sera traduit en français par une équipe de quatre jeunes universitaires français (Jacqueline de Proyart, Michel Aucouturier, Hélène Peltier, Louis Martinez), qui ne signeront pas la traduction afin de pouvoir, le cas échéant, continuer à voyager en URSS. (Entretiens avec L. Martinez, 15/5/2009 ; Jacqueline de Proyart, 16/6/2009 ; M. Aucouturier, 26/6/2009). Cette situation attire l’attention sur le choix de l’anonymat à des fins de protection du traducteur dans un contexte de forte politisation des enjeux de la traduction, et n’est d’ailleurs pas singulière dans l’histoire des transferts littéraires Est/Ouest.

9 Lettre de Boris Pasternak à Jaqueline de Proyart, 2 août 1959, dans Boris Pasternak, Lettres à mes amies françaises (1956-1960), Paris, Gallimard, 1994, p. 186.

10  Giangiacomo Feltrinelli, « The Zhivago Millions », The Sunday Times, 31 mai 1970. Consulter également Ivan Tolstoï, Otmytyj roman Pasternaka, « Doktor Zhivago » mezhdu KGB i TsRU, Moskva, Vremya, 2009 ; Lazar Fleishman, Vstreča russkoj emigracii s « Doktorum Živago » : Boris Pasternak i « cholodnaja vojna », Stanford, Stanford University Press, 2009 ; Paolo Mancosu, Inside the Zhivago Storm : the Editorial Adventures of Pasternak’s Masterprice, Milan, Feltrinelli, 2013 ; Peter Finn, Petra Couvée, The Zhivago Affair : The Kremlin, the CIA and the Battle over a Forbidden Book, New York, Pantheon, 2014.

11  Voir Ioana Popa, « La circulation transnationale du livre : un enjeu de la guerre froide culturelle », Histoire@Politique. Politique, culture, société, n° 15, 2011.

12  Voir Ioana Popa, Traduire sous contraintes, op. cit., p. 389-533.

13  Selon le terme utilisé par Alexandre Soljénitsyne dans son livre de souvenirs Les Invisibles, Paris, Fayard, 1992.

14 Notion empruntée à Robert Darnton, Édition et sédition, op. cit., p. 119 et suiv. et The Forbidden Best-Seller, op. cit., p. 181-197.

15 Michel Foucault « Qu’est-ce qu’un auteur ? », dans Dits et écrits, Tome 1, Gallimard, 1994, p. 789-821. Sédimentée au XVIIe siècle, la différence entre « écrivain » et « auteur » tient au fait que « pour s’ériger en auteur, écrire ne suffit pas ; il faut, de plus, faire circuler ses œuvres dans le public par le moyen de l’imprimé ». Roger Chartier, Culture écrite et société. L’ordre des livres (XIVc-XVIIIc siècle), Paris, Albin Michel, 1996, p. 59.

16 Voir la « Présentation » faite par Susanna Roth (sa traductrice en allemand), dans Bohumil Hrabal, Une trop bruyante solitude, Paris, Robert Laffont, 1983, p. 129-132 et ses articles « Solitude et oubli. À propos d’Une trop bruyante solitude de Bohumil Hrabal » et « Les Palabreurs de Bohumil Hrabal. Continuité ou rupture dans l’évolution littéraire ? », Études tchèques et slovaques, n° 3, 1982, p. 7-17 et n° 2, 1981, p. 63-81.

17 Entretien avec Marie-Elisabeth Ducreux, 29/1/1999.

18 Entretiens avec Zofia Bobowicz, 25/2/1999 et Milena Braud, 2/2/1999.

19 Michel Foucault, « Qu’est-ce qu’un auteur ? », Art. cit. Pour une analyse recourant à cette notion à propos d’un autre contexte socio-historique, voir Matthew Philpotts, « Surrendering the Author-function. Günter Eich and the National Socialist Radio System », dans Francesca Billiani (dir.), Modes of Censorship and Translation : National Contexts and Diverse Media, Manchester, St. Jerome, 2007, p. 257-278.

20  Gideon Toury, « A Rationale for Descriptive Translation Studies », dans Theo Hermans (éd.), The Manipulation of Literature. Studies in Literary Translation, London, Croom Helm, 1985, p. 16-41 ; Descriptive Translation Studies and Beyond, Amsterdam, John Benjamins, 1995 ; Michel Espagne, Michael Werner, « La construction d’une référence culturelle allemande en France. Genèse et histoire (1750-1914) », Annales ESC, n° 4, 1987, p. 969-992 et Les Transferts culturels franco-allemands, Paris, PUF, 1999.

21  Howard Becker, Les Mondes de l’art, Paris, Flammarion, 1988.

Citer cet article

Référence électronique

Ioana Popa, « Traduction et sédition. Circulations transnationales clandestines des œuvres en contexte non démocratique », Atlantide [En ligne], 5 | 2016, mis en ligne le 01 juillet 2016, consulté le 09 octobre 2025. URL : https://atlantide.pergola-publications.fr/index.php?id=1000

Auteur

Ioana Popa

Docteure en sociologie de l’EHESS et chargée de recherche au CNRS (Institut des Sciences Sociales du Politique, UMR 7220), ses recherches portent sur des circulations culturelles et scientifiques Est/Ouest pendant la Guerre froide. Elle travaille par ailleurs sur l’institutionnalisation et la construction internationale des études sur les aires culturelles en France. Elle est l’auteur notamment de Traduire sous contraintes. Littérature et communisme (1947-1989), Paris, CNRS Éditions, 2010.

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